Nicolas Cage incarne un ambulancier new-yorkais au bord du gouffre dans "À tombeau ouvert" de Martin Scorsese. Un long-métrage pour lequel l'acteur s'est préparé en suivant des membres du personnel hospitalier, devenant ainsi témoin de situations extrêmement difficiles à vivre.
À tombeau ouvert : le petit frère de Taxi Driver
Ambulancier new-yorkais au début des années 90, Frank Pierce (Nicolas Cage) est un drogué en manque. Cela fait des mois qu'il n'a pas été capable de sauver un de ses patients alors que sa devise est la suivante : "Aide ton prochain, tu t'aideras toi-même". Au bord du gouffre et ne cherchant qu'à se faire virer pour enfin pouvoir dormir, il est hanté par les fantômes des personnes qu'il a vu mourir et plus particulièrement par celui de Rose (Cynthia Roman), une jeune femme qu'il n'a pas réussi à maintenir en vie.
À tombeau ouvert fait vivre au spectateur trois nuits décisives pour ce héros en quête de paix, qui a de plus en plus de mal à garder son calme avec ses collègues Larry (John Goodman), Marcus (Ving Rhames) et Tom (Tom Sizemore), qui tiennent le coup chacun à leur manière. Ses rencontres avec Mary Burke (Patricia Arquette), fille d'un patient victime d'un arrêt cardiaque, Noel (Marc Anthony), un homme devenu fou et désormais accro à l'eau, ou encore avec le dealer Cy (Cliff Curtis) vont chambouler son existence et peut-être lui permettre de trouver l'apaisement.
Sorti en 2000 et adapté du roman autobiographique Ressusciter les morts de Joe Connelly, le long-métrage marque les retrouvailles entre le réalisateur Martin Scorsese et Paul Schrader, ici scénariste, après Taxi Driver, Raging Bull et La Dernière tentation du Christ. Le film a d'ailleurs de nombreuses similitudes avec celui centré sur Travis Bickle, à commencer par les références religieuses. Dépressif au même titre que le chauffeur incarné par Robert De Niro, Frank Pierce voit par exemple des signes de crucifixion dans la ville et espère pendant ces trois nuits assister à une résurrection.
Une préparation éreintante pour Nicolas Cage
Mais contrairement à Travis Bickle, le protagoniste d'À tombeau ouvert reste résolument positif et plutôt que d'abattre ses semblables, il préfère leur venir en aide. Épuisé, cerné et aveuglé par les lumières artificielles qui inondent les rues de New York (magnifique travail du chef opérateur Robert Richardson), Frank s'accroche et ne perd jamais totalement espoir. Constamment sur le fil du rasoir et ne s'offrant que de rares moments pour crier sa détresse, Nicolas Cage livre une performance exceptionnelle dans ce rôle.
Pour se glisser dans la peau de son personnage, le comédien suit des ambulanciers ainsi que des membres du service hospitalier. Des expériences profondément marquantes pour l'acteur, qui raconte lors d'une interview en 1999 :
Une fois, j'étais à bord d'une ambulance et on m'a dit d'enfiler un gilet pare-balles. Je ne suis pas ambulancier, je suis acteur. Donc j'étais terrifié.
"Qu'est-ce que tu penses de ça, Nic ?"
Nicolas Cage explique par ailleurs que la seule personne qui l'a reconnu pendant sa formation était un médecin-chef des urgences. Et même s'il l'avait apprécié dans Rock, ce dernier n'a pas manqué de faire savoir au comédien qu'il n'était pas "la star" dans cet environnement :
Ils faisaient une sternotomie et il y avait du sang partout. Et il y avait deux cadavres sur une table et j'essayais de rester calme face à tout ça. Il n'arrêtait pas de me regarder, du genre : 'Qu'est-ce que tu penses de ça, Nic ?'
Au cours d'un entretien accordé au journaliste Jimmy Carter, l'acteur assure qu'il a trouvé cette immersion "terrifiante et déprimante". À cela s'ajoute le tournage "intense" qui dure environ cinq mois et se déroule la plupart du temps la nuit. En résulte une interprétation habitée dans un long-métrage qui n'est certes pas le plus cité de la carrière de Martin Scorsese, mais qui s'impose comme une réussite à tous les niveaux.