Dans "Black Book", Carice Van Houten incarne une résistante juive qui se rapproche dangereusement d’un officier allemand pendant la Seconde Guerre mondiale. Paul Verhoeven et son co-scénariste Gerard Soeteman lui ont écrit un destin aux nombreux points communs avec celui d’une héroïne de guerre.
Black Book : le retour en Hollande de Paul Verhoeven
Au début des années 2000, après avoir vécu une expérience douloureuse sur le tournage d’Hollow Man : L’Homme sans ombre, Paul Verhoeven déserte Hollywood pour revenir dans sa Hollande natale. Au côté de son complice Gerard Soeteman, avec lequel il a coécrit Le Choix du destin et La Chair et le sang, le cinéaste relance Black Book, un projet en sommeil qu’ils envisagent depuis les années 80.
Récit de vengeance tragique débutant en 1944, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le film est centré sur Rachel Stein. Après la destruction de sa cachette, cette chanteuse tente de rejoindre la Belgique avec sa famille et plusieurs autres réfugiés juifs. Mais lors de leur traversée du delta du Biesbosch, des soldats allemands les interceptent et les fusillent.
Rachel est la seule survivante du massacre. Emmenée par un groupe de résistants à La Haye, l’héroïne décide de les aider pour se venger. Sa mission est d’infiltrer le Service de Renseignements allemand. Pour cela, elle se rapproche de l’officier Müntze, qui tombe sous son charme.
L’horreur de la guerre dénuée de tout manichéisme
Provocant, violent et haletant, Black Book enchaîne les péripéties à une vitesse folle. Avec une mise en scène virtuose et furieuse, Paul Verhoeven montre les horreurs de la guerre sans manichéisme. Les traîtres se cachent dans tous les camps et les immondices continuent lorsque la fin du conflit a été déclarée.
Comme à son habitude, le réalisateur se garde bien d’asséner une quelconque morale et se contente de mettre en lumière des paradoxes, notamment grâce à la présence de personnages érigés en héros malgré leurs négociations à l’amiable avec des nazis. Un récit complexe que le spectateur vit à travers les yeux de l’héroïne courageuse et bouleversante interprétée par Carice Van Houten, la future Mélisandre de Game of Thrones, pour qui la paix semble impossible.
Le titre du film fait référence à un véritable carnet noir tenu par un avocat de La Haye. Ce dernier a inspiré le personnage du notaire qui vient en aide à Rachel à plusieurs reprises. Dans ce livret, l’homme de loi notait les noms des traîtres à la Résistance et des collaborateurs. Abattu à la fin de la guerre, ses assassins n’ont jamais été retrouvés, au même titre que le fameux carnet.
Un personnage proche d'une figure de la Résistance
Le parcours de Rachel et sa mission d’infiltration évoquent par ailleurs ceux d’Hélène Moszkiewiez. Cette résistante a raconté ses faits d’armes dans une autobiographie intitulée Ma guerre dans la Gestapo, publiée en 1992 en France.
En 1940, cette fille d’un tailleur juif est recrutée en Belgique par les services secrets londoniens. Grâce à sa maîtrise parfaite de l’allemand, la jeune femme de 20 ans parvient à se faire embaucher au siège de la Gestapo de Bruxelles. Elle se fait alors appeler Olga Richter et travaille en tant que secrétaire. Durant deux ans, elle gagne la confiance d’Heinrich Müller, le chef de la police politique du Troisième Reich, afin de lui soutirer des informations capitales. Une fois la guerre terminée, Hélène Moszkiewiez s’installe au Canada. Elle est décédée en 1998.
En 1991, le destin de la résistante est retracé dans le téléfilm Ma guerre dans la Gestapo, dans lequel Martha Plimpton (Les Goonies, À bout de course) l’incarne. L’évolution de Rachel Stein dans Black Book, fait grandement écho à sa vie.