En 1970, le film “Borsalino” réunit les deux plus grandes stars de l’époque : Jean-Paul Belmondo et Alain Delon. Si, sur le papier, l’événement est total, les coulisses seront plus nettement mouvementées.
Borsalino : réunion de deux légendes
Borsalino n’est pas la première collaboration entre Jean-Paul Belmondo et Alain Delon. En effet, avant 1970, les deux hommes avaient déjà tourné quatre films ensemble (Sois belle et tais-toi, Amours célèbres, Paris brûle-t-il ? et Ho !). Connaissant des trajectoires parallèles en termes de succès, Bébel et Delon ont, à l'époque, des relations cordiales. C’est d’ailleurs Delon, qui, en plus d’avoir l’idée du film et de choisir le réalisateur Jacques Deray, souhaite travailler avec son “rival” de l’époque.
En effet, Borsalino est né d'une discussion entre Alain Delon et Jacques Deray durant le tournage de La Piscine en 1968. À cette période, le comédien avait fini de lire le roman de gangsters Bandits à Marseille d'Eugène Saccomano. Il veut donc l’adapter au cinéma. Et quand Delon veut, il l’obtient !
Borsalino retrace donc les aventures de François Capella et Roch Siffredi, deux voyous très amis, qui vont devenir les truands phares de la pègre marseillaise. Grâce aux deux têtes d’affiche, le long-métrage est un grand succès dans les salles avec plus de 4,7 millions d'entrées. Un très bon score, quand on sait que le film a reçu de nombreux coups de pression de la part de la “vraie” mafia phocéenne, et a vu son budget être amputé de 17% suite à la dévaluation de la monnaie en 1969. Cependant, c’est peu avant sa sortie que les vrais problèmes arrivent.
L’affiche de la discorde
Si durant le tournage de Borsalino Jean-Paul Belmondo et Alain Delon s’entendent très bien, c’est lors de la promotion du long-métrage que la brouille arrive. En effet, quelques jours avant la sortie du film, l’affiche officielle voit le nom de Delon apparaître deux fois : une fois comme acteur et une fois comme producteur (avec le fameux “Alain Delon présente”). C’en est trop pour Bébel qui estime qu’il a été mis devant le fait accompli et que ce n’était pas dans le contrat que Delon voit son nom être inscrit deux fois dans l’affiche (qui plus est, au-dessus du sien !).
Dans une colère noire, la star décide même de ne pas assister à l’avant-première du film ! Caprice de star ? Ego touché ? Toujours est-il que les deux hommes s'embrouillent par micros interposés, ce qui paradoxalement joue en faveur du succès de Borsalino puisque la presse fera en sorte d’entretenir la rivalité légendaire entre eux.
Plus tard, Bébel ira beaucoup plus loin en portant l’affaire devant les tribunaux. Ubuesque ? Toujours est-il que trois ans plus tard, la justice lui donne raison. C’est la fin d’une belle amitié entre deux hommes qui passeront les deux décennies suivantes à se bouder en mode Booba-Kaaris. Par ailleurs, il y aura une suite à Borsalino, intitulée Borsalino & co. Alain Delon sera présent, mais sans Jean-Paul Belmondo, dont il fait tuer le personnage qu’il interprétait. Ambiance.
Le calumet de la paix
Au milieu des années 90, les deux hommes commencent à se rabibocher. Cette réconciliation se retrouve à l’écran puisque non seulement ils se retrouvent au générique de Les Cent et Une Nuits de Simon Cinéma d’Agnès Varda, mais surtout, ils sont de nouveau en tête d’affiche dans la comédie d’action Une chance sur deux (réalisée par Patrice Leconte, et dans laquelle on retrouve également Vanessa Paradis). Le film aura même la bonne idée de glisser quelques clins d’œil à Borsalino.
Dès lors, les deux acteurs redeviendront potes et ne reparleront plus de ce problème contractuel et juridique. Une belle amitié qui prendra fin le 6 septembre 2021, à la mort de Bébel. Un décès qui ébranlera totalement Alain Delon, comme il l'exprimait avec émotion le lendemain, sur Europe 1.