CRITIQUE / AVIS - Mettant en scène des personnes bloquées sur un pont en plein brouillard avant l'attaque de chiens tueurs, "Project Silence" ne parvient pas à tenir ses promesses de divertissement coréen.
Project Silence, film coréen de minuit au Festival de Cannes
Il n'est pas rare que le Festival de Cannes mette à l'honneur le cinéma de genre coréen. Comme souvent, c'est en séance de minuit de la 76e édition qu'on pouvait découvrir une œuvre un peu à part entre deux films de la compétition : Project Silence de Kim Tae-gon avec notamment Lee Sun-kyun, Ju Ji-hoon et Kim Su-an. Il aura fallu attendre plus d'un an pour que le public puisse découvrir à son tour le film en salles, mais il s'en serait bien passé.
Avec Project Silence, on s'attendait à voir une série B fun et décomplexée à partir d'un pitch prometteur : un accident de voiture sur un pont, la circulation bloquée par un brouillard incessant et des créatures dangereuses prêtent à bondir sur les rescapés... De cela, et après les premières minutes, on repense à Dernier train pour Busan (présenté justement hors compétition en « Séances de minuit » au Festival de Cannes 2016). D'ailleurs, le hasard veut que Kim Su-an, la jeune enfant dans le film de zombies, interprète à nouveau une fille délaissée par un père, plus occupé par son travail (joué cette fois par Lee Sun-kyun).
Une déception malgré un bon concept
L'écriture des personnages secondaires suit alors un schéma habituel (surtout dans le cinéma coréen) jusque dans leurs introductions respectives. On y trouve un couple âgé, un dépanneur trop bavard pour amuser la galerie, ou encore une golfeuse professionnelle et son assistante. Pourquoi pas. Puis, vient l'incident et la rapide révélation sur ce qui se trame. Des chiens militaires génétiquement modifiés ont été libérés dans l'accident et l'armée n'a plus aucun contrôle sur eux. Pire, l'un de ces animaux, bien plus qu'un leader, a l'intention de se venger.
Nous voilà dès lors du côté de La Planète des singes (2011), même si Kim Tae-gon tend plutôt vers le nanar. Il parvient tout de même à garder le cap pour ne pas franchir cette frontière, sans pour autant se montrer très convaincant. Le réalisateur ne parvient pas à instaurer une tension suffisante. Et il est à ce propos bien dommage de ne pas le voir utiliser le brouillard autrement que pour créer, scénaristiquement, des complications aux protagonistes bloqués sur le pont.
Mais au-delà de sa mise en scène sans grande saveur, c'est surtout dans la finalité de son histoire que le cinéaste semble passer à côté de son sujet. D'un côté, il y a ce "héros". Un père qui met sa fille au second plan et dont les actes interrogent. Travaillant pour le futur président, il fera tout pour protéger l'image de son employeur. Quitte à mentir et à mettre en danger les civiles présents. Un personnage peu agréable pour lequel on n'aura pas empathie. Qu'importent ses rares moments de bravoure sans véritable cohérence ni crédibilité.
De l'autre côté, il y a, au contraire, ces chiens dont le passé a tout pour émouvoir. Mais n'allant jamais totalement de leur côté - à l'inverse des derniers films La Planète des singes -, Project Silence a de quoi décevoir. Et ce n'est pas avec un dernier plan forcé qu'on peut ressortir avec l'impression que le réalisateur cherche réellement à éveiller les consciences sur la cause animale.
Project Silence de Kim Tae-gon, en salles le 21 août 2024. Le film était présenté au 76e Festival de Cannes hors compétition. Ci-dessus la bande-annonce.