Si le cinéma d'horreur extrême n'est pas populaire aux yeux du grand public, quelques titres arrivent à se détacher et à se forger une vraie aura culte. C'est ce qu'est arrivé à faire "Cannibal Holocaust", un film d'horreur autant connu pour son contenu que ce qui l'entoure.
Cannibal Holocaust : un monument du cinéma d'horreur
Le cinéma d'horreur a pour habitude de déranger son audience. De la bousculer avec des jump scares, des effusions de sang, une ambiance poisseuse. Mais Cannibal Holocaust joue dans une autre cour que les productions habituelles. Sorti en 1980, le film réalisé par l'italien Ruggero Deodato n'a pas volé sa réputation sulfureuse. Le scénario, assez simple, narre comment une équipe d'aventuriers monte une expédition pour retrouver quatre reporters disparus lors de leur passage dans la forêt amazonienne, alors qu'ils sont tombés sur une véritable tribu de cannibales. Le film jongle tout du long entre deux temporalités, la première qui se déroule dans le présent, et la seconde dans le passé avec des plans qui sont tirés des caméras des reporters recherchés. On y trouve déjà la recette du found footage, qui fera parfois le bonheur des fans de genre (Le Projet Blair Witch, , Cloverfield...), et souvent leur malheur. Ce qui choque dans Cannibal Holocaust, c'est ce sentiment de vérité qui anime les séquences les plus violentes. Si vous ne connaissez pas ce monument de l'horreur, sachez qu'on voit dedans quelques joyeusetés qu'on se gardera de décrire dans ces lignes.
Un tournage galère et une sortie mouvementée
Cannibal Holocaust a été tourné en Colombie et les conditions de prises de vue en pleine nature ont donné du fil à retordre à l'équipe. Le climat, en particulier, a été une énorme difficulté à surmonter. La chaleur pouvait grimper très haut et, à l'inverse, des pluies diluviennes avaient le pouvoir d'empêcher de tourner. On ne peut rien faire quand la Nature fait ses caprices. Avant ou après lui, d'autres réalisateurs comme Ruggero Deodato se sont confrontés à la pénibilité d'un tournage en milieu sauvage, avec des histoires parfois légendaires comme celles de Sorcerer de William Friedkin ou d'Aguirre de Werner Herzog. Cannibal Holocaust n'est cependant pas non plus un trou financier, le film est fait avec quelques centaines de milliers d'euros. Un investissement bien maigre quand on voit la réputation qu'il a décrochée.
Pour les scènes de violence, bien qu'on puisse penser à du pur cinéma snuff (ce courant très particulier veut que les actes cruels ou la mort ne soient pas joués mais totalement vrais), des effets spéciaux ont été utilisés pour tout ce qui touche aux humains. La fameuse scène de l’empalement paraît si réelle qu'on pourrait penser qu'elle l'est. Ce qui est faux, bien que des rumeurs infondées aient tenté d'affirmer le contraire pour discréditer le travail de Ruggero Deodato. L'affaire est allée loin lors de la controversée sortie dans les salles accompagnée de censure dans plusieurs pays - logique, le contraire aurait été plus qu'étonnant pour un tel OVNI. Le réalisateur a été forcé de se défendre devant un tribunal italien pour ne pas être accusé du meurtre de ses acteurs. Pour faire taire les rumeurs dont on parlait auparavant, il décide d'apparaître à la télévision avec ses acteurs suite à une période de doute voulue où personne ne savait ce qu'il en était de leur état. Devant les juges, Ruggero Deodato apporte les preuves suffisantes pour démontrer que tout est faux dans son film. Tout, ou presque…
Les humains sont revenus sains et saufs du tournage, mais on ne peut pas en dire autant de certains animaux, qui ont été tués pour de bon devant la caméra. Une pratique qui choque, mais qui n'est pas cachée par le réalisateur lorsqu'on l'interroge dessus. Ce qui lui vaudra une condamnation, plus maigre que s'il en avait été de même pour les acteurs. On imagine que les plans en question ne devaient pas instaurer la meilleure des ambiances sur le tournage. L'acteur Carl Gabriel Yorke a notamment contesté les choix de son réalisateur sur ce point et Robert Kerman a aussi eu quelques échauffourées avec lui.
Aujourd'hui, Cannibal Holocaust a gardé son aura sulfureuse pour ces morts animales desquelles on continue de parler. Si certaines mauvaises langues veulent faire croire que des pratiques pires ont eu lieu sur le plateau, il n'en est rien. Et c'est déjà suffisant comme ça.