En 2020, François Ozon réalise avec "Été 85" un mélodrame bouleversant, racontant l'histoire d'amour, de vitesse et de mort entre deux jeunes garçons au milieu des années 80. Un film à la fabrication experte, source d'une nostalgie renversante, mais qui a été largement boudé le soir des récompenses annuelles du cinéma français...
Été 85, un tragique amour d'été
À force, François Ozon doit se demander ce qu'il a bien pu faire à l'Académie des César pour que celle-ci, pourtant très généreuse en nominations pour ses films, ne lui ait jamais accordé une récompense personnelle. En effet, le réalisateur de Huit femmes, Potiche ou encore Frantz et Grâce à Dieu a été nommé personnellement six fois au César du Meilleur réalisateur, six fois au César du Meilleur film, et cinq fois au César du Meilleur scénario original ou Meilleure adaptation. Pour aucune victoire...
Ses dernières nominations ont été reçues pour Été 85, drame amoureux sorti en 2020 et adapté du roman La Danse du coucou d'Aidan Chambers. Pour Été 85, il confie à Félix Lefebvre et Benjamin Voisin, encore inconnus du grand public, l'histoire d'une rencontre amoureuse entre deux jeunes garçons, un été en Normandie. Alex (Félix Lefebvre), 16 ans, découvre avec David (Benjamin Voisin), 18 ans, son homosexualité. Pour Alex, issu d'un milieu populaire, c'est aussi la découverte d'un autre monde avec David, plus aisé. La liberté, la musique, l'insouciance... Mais leur idylle va être perturbée par l'arrivée d'une jeune fille, Kate (Philippine Velge). Peu après, une dispute éclate entre David et Alex, à l'issue de laquelle David part en moto et se tue sur la route...
Un mélodrame expert et flamboyant
Avec sa reconstitution experte et incarnée des années 80, François Ozon, né en 1967, propose un film où se perçoit aussi une source autobiographique. Récit intime d'un éveil à l'amour et à la sexualité, Été 85 est par ailleurs l'histoire de toute une génération, incarné par deux formidables acteurs. La musique (The Cure, Rod Stewart), des images tournées en pellicule et au format Super 16 pour apporter du grain, ses décors et ses accessoires : impossible de ne pas se laisser emporter dans cette capsule temporelle aux événements bouleversants.
À sa sortie en juillet 2020, dans une période compliquée par la pandémie de Covid-19, le film attire 364 000 spectateurs dans les salles. Il fait alors bien moins que Grâce à Dieu, sorti en 2019 et qui avait cumulé environ 915 300 entrées. Mais sur le plan critique, Été 85 est acclamé par une presse unanime et plaît à la profession : il est en effet nommé dans 13 catégories à la cérémonie des César 2021.
Un triste record aux César
Aux César 2021, Été 85 fait partie des favoris de la soirée de récompenses avec 13 nominations. Adieu les cons d'Albert Dupontel en compte aussi 13, et Les Choses qu'on dit, les choses qu'on fait d'Emmanuel Mouret mène le bal avec 14 nominations. Le grand gagnant de la soirée est Adieu les cons qui remporte 7 César, dont ceux de Meilleur film et Meilleure réalisation. Le film d'Emmanuel Mouret remporte seulement le César de la Meilleure actrice dans un second rôle pour Émilie Dequenne et Été 85... n'en obtient aucun.
Une déception pour François Ozon et ses acteurs principaux, tous deux nommés au César du Meilleur espoir masculin, ainsi que pour ses équipes chargées du son, de la photographie, du montage, des costumes et des décors... Cette absence de récompenses fait qu'Été 85 égalise un triste record. Celui établi par Camille redouble en 2013, avec le plus grand nombre de nominations reçues par un film pour aucun César remporté.
Et ce n'est malheureusement pas une première pour François Ozon, puisqu'avant cette marque de 13 nominations et 0 César établie en 2013, c'était déjà un de ses films qui détenait ce record. En effet, un de ses plus grand succès, Huit Femmes, avait reçu en 2003 12 nominations aux César mais n'en avait gagné aucun...
Son nouveau film Quand vient l'automne, au cinéma le 2 octobre 2024, pourrait-il inverser cette tendance et obtenir quelques récompenses, voire même enfin permettre à François Ozon d'être personnellement distingué ?