Ce soir France 5 diffuse "Pierrot le Fou", le film culte de Jean-Luc Godard avec Jean-Paul Belmondo et Anna Karina. À sa sortie, la violence du film avait choqué la commission de censure qui l'avait interdit aux moins de 18 ans.
Pierrot le Fou : film culte pour Godard et Belmondo
On pense souvent à Jean-Paul Belmondo pour ses rôles d'action dans lesquels l'acteur se livrait à des cascades folles. De l'action, mais aussi de la comédie, comme avec Le Magnifique (1973), qui valu au passage une grave blessure à Belmondo. Cependant, le comédien a aussi prouvé dans des rôles plus dramatiques, comme avec Léon Morin, prêtre (1961). Toutes ses qualités d'acteur ont motivé des grands réalisateurs à le diriger, tel que Jean-Luc Godard, qui lui a offert trois rôles dans des longs-métrages : À bout de souffle (1960), Une femme est une femme (1961) et Pierrot le Fou (1965).
Ce dernier est l'un des films cultes des carrières du cinéaste et du comédien. Une œuvre qui en a inspiré bien d'autres (comme Pardonnez-moi, le premier film de Maïwenn qui fait un clin d'œil à la peinture bleue sur le visage de Belmondo). Et marquée par une réplique célèbre : "Si vous n'aimez pas la mer, si vous n'aimez pas la montagne, si vous n'aimez pas la ville... allez vous faire foutre !"
Pourtant, à sa sortie, les réactions sur Pierrot le Fou ont été virulentes. Dedans, Jean-Paul Bemondo joue Ferdinand Griffon, dit "Pierrot", un homme marié qui décide un jour de tout plaquer après avoir retrouvé une ancienne amie, Marianne (Anna Karina). Cette dernière étant recherchée pour meurtre, ils partent ensemble en voiture en direction du sud de la France dans le but de voir la mer. S'ensuit un road trip romantique tinté de violence. Une violence qui a alors été pointée du doigt et a limité l'accès du film au public.
Une violence qui ne passe pas à l'époque
En effet, comme le raconte un article Saga de l'été du CNC consacré à Pierrot le Fou, à l'époque, la commission de censure a décidé d'attribuer au film une interdiction moins de 18 ans. Les membres de la commission avaient été choqués par l'aspect amoral du film et de ses protagonistes en cavale. Pour l'un de ces membres, Pierrot le Fou était "un hymne à la violence, à la sensualité, au meurtre, sans aucune contrepartie morale". De plus, Jean-Luc Godard présentant une "société morne et oppressante" dans son film, ce qui paraissait être "une critique directe de la France gaullienne" ne passait pas auprès de la commission.
Dans le dossier Un défi à la loi ? Les controverses autour de Pierrot le Fou de Jean-Luc Godard, Boris Gobille analyse cette controverse autour du film, à partir de la presse de l'époque, et confirme qu'elle provient avant tout de cette absence de "contrepartie morale" et de l'esthétisation de la violence. Comme l'écrit l'auteur, Pierrot le Fou associe l'illégalité à une forme de liberté et de sensualité et l'oppose à la normalité (avoir un métier, une famille, etc.).
Résultat, avant même sa sortie en salles, Pierrot le Fou s'est fait siffler après sa présentation à la Mostra de Venise de 1965. La critique professionnelle s'est alors divisée à son sujet. Certains pointant notamment le fait qu'il y ait "beaucoup de sang dans Pierrot le Fou". Ce à quoi répondra Jean-Luc Godard dans les Cahiers du Cinéma : "Pas du sang, du rouge". Des années plus tard, le long-métrage sera reconnu à sa juste valeur pour sa modernité (comme lorsque Belmondo brise le quatrième mur en s'adressant aux spectateurs). Et malgré l'interdiction aux moins de 18 ans, le film a tout de même attiré à l'époque plus d'1,3 million de spectateurs en salles.