Dix-neuvième long métrage du studio Pixar, « Coco » a enchanté les spectateurs en les berçant dans un torrent d’amour familial et de tendres souvenirs. Disponible en Blu-ray depuis le 6 avril 2018, le Pays des Morts n’a jamais paru aussi vivant.
Six années de travail intensif ont été nécessaires afin de porter Coco sur les grands écrans du monde entier. À cette occasion, Pixar s’est entouré d’une équipe impressionnante où l’on compte notamment le réalisateur Lee Unkrich et le co-réalisateur Adrian Molina. Tous deux n’étaient pas étrangers à l’entreprise à la lampe de bureau puisqu’ils ont respectivement planché sur Toy Story 2 (1999) et Le Voyage d’Arlo (2015). Chacun a pu ainsi mettre son expérience au profit de cette nouvelle aventure d’animation et, bien entendu, le succès ne s’est pas fait attendre.
Coco : un Pixar qui s’annonce immortel ?
Avec 790 millions de dollars de recettes internationales, Coco remporte largement la manche contre Cars 3 qui en a « seulement » rapporté 384 millions en 2017. Score très honorable pour ce doux hommage au Mexique, bien qu’il ne soit pas parvenu à détrôner Le Monde de Dory (2016) et son milliard de billets verts. Il faut dire que l’engouement pour ce dernier n’était guère étonnant au vu de la popularité inoubliable de son grand-frère : Le Monde de Nemo (2003).
L’œuvre a également fait forte impression lors des cérémonies, décrochant l’Oscar du Meilleur Film d’Animation et celui de la Meilleure Musique Originale pour un Film d’Animation. Elle éblouit d’autant plus en raflant pas moins de onze Annie Awards, dont deux nominations supplémentaires. Il s’agit là d’une véritable consécration pour le studio Pixar qui a connu plus d’une déception ces dix dernières années.
Traditions et mémoire
Dès les premières images, le public est transporté au cœur de la tradition mexicaine tandis que l’intrigue est narrée sur un fond de papel picado colorés. Âgé de douze ans, Miguel (Anthony Gonzalez) souffre de s’être épris d’une passion qui lui est inaccessible : la musique. Bannie au sein de sa famille depuis plusieurs générations, c’est un tabou qu’il convient de ne pas déterrer. Commence dès lors l’exploration d’un passé où le problème a pris racine, lorsque son arrière-arrière-grand-père a abandonné sa famille dans le but de vivre de son instrument. Ce traumatisme s’est ensuite transmis, propagé, à l’arbre généalogique, et c’est contre celui-ci que l’enfant doit lutter s’il veut parvenir à faire accepter son inclination. Cette ficelle scénaristique permet de faire le point sur le déroulement behind the scene de multiples carrières, entre sacrifices, compromis et lutte acharnée.
Fan du célèbre et décédé Ernesto de la Cruz (Benjamin Bratt), c’est à travers ses titres et ses films que Miguel tire son apprentissage de la guitare. La triste réalité veut que cela soit uniquement possible en se dérobant aux yeux de ses proches, dissimulé dans la seule cachette où il peut exercer son art en toute liberté. Jusqu’au Jour des Morts où il décide de participer à un concours, et qu’une série de péripéties le fait pénétrer dans le Royaume des Morts. Dans ce lieu haut en couleurs et tranchant radicalement avec la représentation occidentale de l'au delà, il retrouve les défunts squelettiques issus de sa famille. Plus que jamais, le garçon doit saisir l’opportunité qui lui est offerte : celle de réconcilier ses ancêtres avec la musique.
Dans une société de plus en plus individualiste, Coco fait office d’un ovni et d’une piqûre de rappel en témoignant de l’importance des liens familiaux, des traditions et des souvenirs. Cette ode à la mémoire est renforcée par l’Alzheimer dont souffre l’arrière-grand-mère du protagoniste (Ana Ofelia Murguía) qui se révèle être le pilier de l’intrigue. Il lui faut combattre ce terrible adversaire pour que son père ne soit pas condamné à l’oubli.
Si l’histoire parait morbide au premier abord, le résultat final est tout autre. Les artistes de Pixar parviennent à aborder des thèmes délicats comme la réminiscence des disparus, avec subtilité et chaleur. Ils osent même poudrer Coco de touches d’humour agréables et rafraîchissantes tout en évitant la surenchère malheureusement présente dans Vaiana (cf. Hei Hei). L’univers des morts regorge de joie, de gaieté, et de lumières vives, le faisant paraître presque plus accueillant que celui des vivants. Lieu propice pour les gags en tout genre, il déclenche l’hilarité à plusieurs reprises grâce aux animateurs n’hésitant pas à jouer avec l’apparence de ses occupants. Des instants plus sobres, à l’instar de l’une des dernières scènes, plongent le spectateur dans une ambiguïté sentimentale. Pleure-t-on de tristesse ? De joie ? Derrière cette confusion se cache la certitude que le studio détient là une de ses plus grandes réussites.
Les différentes éditions
Il existe un tel florilège d’éditions à travers le globe qu’il est difficile de toutes les recenser. La France bénéficie, elle, d’un DVD simple, d’un Blu-ray et d’un Blu-ray 3D inédit aux États-Unis. Cette exclusivité n’est pas sans perte puisque le pays de l’autre côté de l’océan atlantique bénéficie lui d’un Blu-ray 4K. À l’acheteur de voir la technologie qu’il préfère et dans laquelle il souhaite investir. Il est important de noter que la galette bleue américaine ne contient pas la version française parisienne mais canadienne. Le support 4K se contente simplement des sous-titres dans la langue de Molière.
Les collectionneurs français peuvent se tourner en direction de la FNAC qui distribue un steelbook du plus bel effet, avec un embossage travaillé. Accompagné d’un livret de 90 pages foisonnant d’informations et d’illustrations, il est maintenant difficile à dénicher. Bonne chasse !
Test Vidéo/Audio : un disque plein de vie
Achevé en 2K, Coco n’est pas dans un format natif en concordance avec le Blu-ray 4K. Cela se ressent d’ailleurs puisque, bien que la saturation soit plus riche et nuancée, le disque ne se démarque pas suffisamment du Blu-ray standard. Il faut avouer que ce dernier ne saurait être plus en forme ! Les détails abondent, qu’il s’agisse de détails provenant de l’ofrenda, ou même de l’usure des bâtiments. La complexité du design des personnages est aidée par une définition impeccable : rides, texture de la peau, matière des habits… La galette ne manque pas une occasion de montrer la détermination qui a animé les animateurs.
Les images de synthèses entretiennent deux atmosphères dissemblables, particulièrement robustes en haute définition. La première, dans le Royaume des Morts, joue sur des contrastes poussés et une large palette de couleurs, synonymes de l’exaltation qui y règne. Toutes parviennent à se dénoter des unes des autres, et livrent un spectacle souvent époustouflant. Pepita, l’alebrije de la famille, en est l’exemple parfait. L’ambiance est plus douce, intimiste, et tire généreusement sur les tons chauds dans le monde des vivants. Cette diversité offerte par ce film d’animation élève le Blu-ray au rang de démo, d’autant plus que les noirs sont profonds et maîtrisés.
Quant aux pistes sonores, elles sont au nombre de six : Anglais DTS-HD Master 7.1, Anglais DTS-HD HI RES 5.1, Français Dolby Digital Plus 7.1, Néerlandais Dolby Digital 5.1 et, enfin Flamand Dolby Digital 5.1. Si l’audio original en 7.1 aurait gagné à être un tantinet plus élevé, cette source n’en est pas pauvre pour autant. Bien que les dialogues soient clairs et prioritaires, c’est par l’omniprésence de la musique que la bande son marque les esprits. Les accords joués à la guitare par Miguel sont aussi précis que spatialisés, influant une impression de réalisme à couper au couteau. En accord avec le visuel, les environnements sonores sont variés, allant de l’action à l’émotion pure. Malgré ce défi, l’immersion est complète et ne déçoit pas. La version française est légèrement en deçà, mais se défend sans avoir à rougir. Dommage qu’une piste espagnole n’ait pas trouvé sa place.
Test Bonus
Répartis sur deux disques, les suppléments ne manquent pas et sont (presque) exhaustifs. Un reportage sur le casting vocal aurait été apprécié, ainsi qu’une galerie regroupant les affiches, des storyboards, des concept arts, etc. Mais ne boudons pas notre plaisir !
Disque 1 :
- Bienvenue à la fête (2:16 min) : ce « diorama » date du début de la phase d’animation. Il permet à l’équipe de visualiser précisément le ton et l’aspect global de la direction dans laquelle elle s’apprête à se lancer. Dans ce plan unique, le plus long de tous les Pixar confondus, le spectateur parcoure le cimetière dans une atmosphère de recueillement, puis débarque dans le Royaume des Morts. Danses folkloriques et explosions de couleurs sont au rendez-vous. Les personnages ressemblent déjà fortement à leur version achevée. Une option est proposée, à savoir celle de le visionner avec ou sans le commentaire audio de Lee Unkrich, d’Adrian Molina et de la productrice Darla K. Anderson.
- Mi familia (10:00 min) : une poignée de membres de l’équipe répondent à la question « Est-ce que votre famille a des règles bizarres ? ». Illustré par des images datant du voyage au Mexique en 2011, le documentaire revient ensuite sur la famille mexicaine et celle de Miguel. Plusieurs anecdotes sont proposées, comme la présence d’ofrenda dans les bureaux de Pixar. Tous étaient invités à poser une photographie d’une personne chère et défunte.
- Dante (6:14 min) : focus sur le chien errant dont l’existence se justifie notamment par l’amour que vouent Unkrich et Anderson au meilleur ami de l’homme. Des extraits d’un séjour à Oaxaca de Juárez sont divulgués, au cours duquel les employés du studio ont étudié la race du personnage canin : les xoloitzcuintle. Dante est inspiré d’un ancien mythe aztèque selon lequel une personne décédée avait besoin d’un xolo afin de pouvoir trouver son chemin en direction du Monde des Ancêtres.
- Comment dessiner un squelette (3:18 min) : ce tutoriel filmé est orchestré par le directeur artistique des personnages, nommé Danny Arriaga. Après une tentative (et ce malgré l’absence de la fibre artistique) il faut avouer que la méthode est aussi simple qu’efficace !
- Commentaire audio : le trio du premier bonus est de retour avec, pour fonction, de discuter de Coco en long, en large, et en travers. Lors de l’enregistrement, le long métrage était achevé mais pas encore disponibles en salle. Ils s’arrêtent entre autres sur les voyages d’étude, avouent avoir introduit à clin d’œil à Shining (1980), et confessent s’être inspirés de la Poste centrale de la ville de Mexico pour structurer la Grande garde centrale des fleurs. La piste est présentée en Dolby Digital 2.0.
Disque 2 :
- Carnets de voyage (20:03 min) : beaucoup de recherches ont été menées afin d’éviter les idées préconçues de la famille mexicain et de ses habitudes. L’équipe accordait une importance cruciale à la véracité de ce qu’ils représenteraient à l’écran. Costumes, décors, nourriture, atmosphère... Tout est passé au crible fin. Sur place, tous ont apprécié faire la connaissance des habitants dont certains ont été une réelle source d’inspiration. Des détails infimes ont ainsi été reproduits, comme la présence d’objets Pixar dans les rues. En outre, ce supplément présente une visite chez un cordonnier ainsi que dans un marché, et s’attarde sur les alebrije et le Jour des Morts.
- La musique de Coco (13:12 min) : retour sur les performances acoustiques qui permettent de guider l’audience et de représenter les émotions des personnages à l’échelle sonore. Des images tournées lors des enregistrements ponctuent cette featurette, qui étudie l’ensemble des genres et des instruments figurant dans le film. Le compositeur Michael Giacchino et bien d’autres sont de la partie.
- Le monde de nos ancêtres (6:19 min) : beaucoup de lectures sur le folklore mexicain et les croyances ont été nécessaires pour créer cet univers imaginaire et dynamique. Les intervenants s’attardent sur l’architecture et les couleurs choisies, ainsi que sur les règles instituées pour introduire une cohérence à ce monde alternatif.
- Le monde à travers les générations (8:39 min) : ce bonus a pour objectif d’étudier le travail effectué sur les habits dans Coco. Les recherches se sont étendues du nord au sud du Mexique, et sur une période allant de la fin du XIXème siècle à nos jours. Les habits en disent long sur les personnages, dont leur caractère et le lieu où ils ont vécu.
- La vraie guitare (3:08 min) : rencontre avec le fabricant de guitare German Vazquez Rubio, et le dessinateur qui a porté l’instrument d’Ernesto à l’écran : Eernesto Nemesio. Les couleurs, les textures et les motifs sont d’autant plus d’aspects sur lesquels s’étend ce court métrage.
- Les chemins qui mènent à Pixar (11:44 min) : des employés de Pixar ayant travaillé sur Coco reviennent sur leurs motivations durant leur enfance, sur leur arrivée au studio, ainsi que sur leur parcours respectif depuis.
- Comment fabriquer un papel picado (2:19 min) : tutoriel présenté par l’illustratrice Ana Ramírez González.
- Tu as le rôle ! (2:12 min) : s’il n’était au départ que la voix temporaire de Miguel, Anthony Gonzalez se voit offrir ici le rôle principal.
- Scènes coupées (33:07 min) : au nombre de sept, chacune est précédée par les explications de Unkrich et Molina quant à leur contexte et la décision de les supprimer du montage final. Les deux hommes ont également réalisé une introduction globale en supplément. Les scènes coupées sont présentées sous forme de séquences story-boardées accompagnées de voix temporaires. Le public découvre une multitude d’idées abandonnées telles que l’ancienne séance d’ouverture, Héctor (Gael García Bernal) en guide touristique, Miguel prénommé Marco, une malédiction pesant sur la famille dans le Royaume des Morts, et une confrontation finale alternative.
- Bandes-annonces et promos : la bande-annonce américaine (2:12 min), mexicaine (2:34 min), brésilienne (2:01 min) et australienne (2:13 min). Les deux promos offrent des images inédites, et sont intitulées Le repas de Dante (1:56 min) et Un poco coco (3:05 min).