"120 battements par minute" de Robin Campillo, grande fresque sur les années sida en France qui avait bouleversé le Festival de Cannes, a été primé vendredi soir meilleur film lors des César.
Déjà récompensé du Grand prix sur la Croisette l'an dernier, le film a remporté six récompenses lors de la cérémonie des César, sur 13 nominations.
Robin Campillo a attendu plus de vingt ans pour filmer le début de la lutte contre le sida, à travers le combat de l'association Act Up.
Là où de nombreux films sur l'épidémie, qui a fait des ravages dans la communauté homosexuelle, s'attardent sur des destins individuels, le réalisateur de 55 ans a fait le pari du collectif.
Au début de l'épidémie, les gens ont vécu dans leur coin. Avec Act Up, des malades ont voulu casser la malédiction intime pour rendre la maladie plus visible et mettre les politiques face à leurs responsabilités,
avait-il dit en mai à Cannes à l'AFP.
Act Up, c'était "ne plus subir l'épidémie, en être aussi acteur", pour celui qui a été militant de l'association, connue pour ses slogans choc et ses opérations spectaculaires telles que les "die in", avec des participants s'allongeant par terre et faisant le mort.
De la mort, il est bien évidemment question, mais c'est surtout le combat contre l'indifférence, les laboratoires et la maladie qui passe au premier plan.
Le film ne donne pas de conseils mais rappelle juste ce rassemblement de gens contre cette épidémie qui ont construit une conscience et des luttes politiques,
soulignait Campillo, collaborateur de longue date de Laurent Cantet (Palme d'or 2008 avec Entre les murs).
De l'aventure Act Up, il a restitué les opérations spectaculaires à coups de jets de poches de faux sang, les débats tendus pour décider des actions à mener, des positions à adopter et des avancées médicales... Philippe Mangeot, ancien président d'Act Up, a participé au scénario.
Mais le réalisateur des Revenants et d'Eastern Boys montre aussi le sexe, l'amour, les gay pride et les soirées exutoires au son de la house music, dont le tempo donne son titre au film.
120 battements montre un activisme mené bien avant les réseaux sociaux, sans verser dans la nostalgie, ou dans le documentaire, probablement car il fait la part belle à l'histoire d'amour entre Sean, séropositif, et Nathan, qui ne l'est pas.
Révélation du film, Nahuel Pérez Biscayart - également à l'affiche d'Au revoir là-haut - a été sacré vendredi soir meilleur espoir masculin aux César. Antoine Reinartz, qui joue Thibault, le leader d'Act Up dans le film, a reçu le César du meilleur second rôle masculin.
Pedro Almodovar, président du jury de Cannes, avait "adoré" le film qui avait bouleversé la Croisette. 120 battements par minute a aussi été candidat de la France pour l'Oscar du meilleur film étranger mais n'a au final pas été retenu.