En 2021, Régis Roinsard met en scène une enivrante puis tragique passion entre Georges et Camille, amoureux fous qui vont avoir un enfant : Gary. On revient sur la fin mystérieuse du drame "En attendant Bojangles", qui a laissé beaucoup de spectateurs perplexes.
Trop joyeux pour être vrai
Pour son troisième long-métrage, après Populaire en 2012 et Les Traducteurs en 2020, Régis Roinsard adapte le roman En attendant Bojangles d'Olivier Bourdeaut. Il confie les deux rôles principaux de son film En attendant Bojangles, Georges et Camille, à Romain Duris et Virginie Efira. Les deux acteurs incarnent cet homme et cette femme fantasques, épris de liberté et saisis par une passion amoureuse renversante.
L'histoire de En attendant Bojangles se déroule entre les années 50 et 60 et raconte leur rencontre, puis leur mariage soudain et l'arrivée de leur enfant, Gary (Solan Machado-Graner), et enfin leur vie à trois où tout n'est qu'une grande fête, un quotidien où l'on rit, s'amuse et danse, où on n'ouvre pas le courrier et où il n'y a jamais de malheur.
Le spectre de la maladie mentale
Dans En attendant Bojangles, la douce folie qui caractérise la vie de Gary, Georges et Camille, cache cependant une situation plus sombre. Si Camille est si fantasque, fuyant sans cesse par des évasions poétiques la réalité, c'est qu'elle a de terribles idées noires, des souffrances du passé qui remontent et la jettent dans un profond désespoir. Plus que mélancolique, Camille souffre en réalité de bipolarité, et passe ainsi de l'euphorie à la dépression de plus en plus souvent et avec des conséquences de plus en plus graves.
Passé une période d'internement psychiatrique après que Camille a mis le feu à leur appartement, Georges, Camille et Gary s'installent dans un château dans le sud de la France. Ils y sont accompagnés du meilleur ami de la famille, "L'Ordure", un sénateur interprété par Grégory Gadebois, et Camille semble aller bien mieux. Mais ce bonheur retrouvé va n'être que de courte durée...
À la vie, à la mort
Un matin, ne supportant plus son état, Camille met fin à ses jours, après avoir avalé tout un tube de médicaments et être partie nager. Malgré les efforts de Georges pour tenter de la ranimer, elle ne survit pas. Georges, Gary et "L'Ordure" l'enterrent en petit comité, et le soir font un grand feu d'artifice. Malgré les rires, Georges a du mal à retenir ses larmes. Le lendemain, au réveil de Gary, son père n'est plus là, seul reste "L'Ordure"...
Qu'est-il arrivé à Georges ? Dans un dialogue touchant, Gary demande à "L'Ordure" de lui dire si son père est parti, mais en mentant, pour rendre la réalité moins banale et moins triste. Il lui répond alors :
Ton père avait quelque chose de très important à dire à ta mère. Une affaire des plus pressantes. Tu comprends ? Il s'est lancé à sa recherche. Sans lui, tu sais, elle fait souvent n'importe quoi.
L'émotion est à son paroxysme dans cette scène finale d'En attendant Bojangles où l'on comprend, entre les lignes, que Georges s'est très vraisemblablement lui aussi donné la mort, ne pouvant exister sans Camille, celle-ci et l'amour qu'il lui portait étant sa raison de vivre. Et Georges n'aurait pas abandonné Gary pour simplement "partir", on comprend donc qu'il est parti définitivement.
Cette fin tragique d'En attendant Bojangles diffère de celle du roman. En effet, dans le texte d'Olivier Bourdeaut, Georges tue de ses mains Camille pour mettre fin à ses souffrances, avant de se donner la mort. Une fin plus dure, plus ambigüe sur la nature des personnages et la réalité de cette histoire, qui a donc été légèrement modifiée dans le film pour être un peu plus douce... mais pas moins triste.