Grand film du cinéma des 90s, ayant fait de Tom Hanks la superstar qu'on connaît, "Forrest Gump" est un film à part. Retour sur une controverse impliquant l'auteur du roman et les studios Paramount, une controverse qui a peut-être empêché le développement d'une suite...
Forrest Gump est l'un des films les plus emblématiques du cinéma américain des années 90. L’histoire de Forrest Gump est un conte réaliste incroyable à déguster, évidemment, comme une boîte de chocolats. Le film de 1994 peut être raconté par toutes ces dimensions : la mise en scène classique mais efficace de Robert Zemeckis, la performance inoubliable de Tom Hanks (récompensé de son second Oscar du meilleur acteur pour l’occasion), son immense popularité dans le monde, enfin toutes les anecdotes qui y sont rattachées.
Il y a la chaîne de restaurants Bubba Gump Shrimp Company, inspirée du film, il y a le fameux banc de Savannah Square sur lequel Forrest raconte son histoire… Mais il y a aussi les histoires moins glorieuses, qu’on préfère ne pas trop évoquer pour ne pas ternir l’ampleur du succès.
Une controverse de « comptabilité hollywoodienne »
L’histoire de Forrest Gump, de cet homme qui va participer à sa manière aux grands évènements américains de la seconde moitié du 20ème siècle, est unique. Et le film a reçu à ce titre l’Oscar du meilleur scénario adapté en 1995, remis au scénariste Eric Roth. À l’origine, il y a le roman du même nom de Winston Groom, un écrivain et historien américain, dont Paramount acquiert les droits pour 350 000 dollars et signe avec l’auteur un intéressement aux bénéfices nets de l’ordre de 3%.
À la sortie du film, le succès est au rendez-vous, et il l’est même au-delà des espérances. Entrent alors en jeu les méthodes créatives mais surtout opaques du « Hollywood accounting » (comptabilité hollywoodienne en VF), terme qui désigne les particularités d’un système permettant facilement de gonfler les dépenses pour réduire les taxes et les profits liés notamment aux droits d’auteur. Ainsi, alors que le film rapportera finalement 679 millions au box-office mondial, Winston Groom ne touchera rien de ses 3% prévus… Par ailleurs, il n’est mentionné dans aucun des six discours des gagnants aux Oscars pour le film. Malaise. D’autant plus que Hanks et Zemeckis reçoivent chacun environ 40 millions de dollars, étant eux intéressés aux bénéfices bruts…
Mais le succès du film va profiter tout de même à l’écrivain, dont le roman Forrest Gump, écrit en 1986, va connaître une seconde jeunesse et devenir un best-seller mondial, pour atteindre plus d’1,4 million d’exemplaires vendus. Aussi, une suite est plus ou moins en discussion, basée sur la suite du premier roman, Gump & Company, publiée en 1995, dont Paramount a finalement acheté les droits pour une somme inconnue mais à sept chiffres. Prix « réel » ou « gonflé » pour terminer la bataille légale sur les 3% initiaux ? Difficile de faire le tri entre les faits et la légende. D’autant plus que, tragique mouvement de l’histoire, un premier scénario est enfin soumis la veille du 11 septembre 2001… Le projet tombe immédiatement dans les limbes d’Hollywood où végètent les projets maudits.
Une suite impossible ?
Plus aucune nouvelle avant l’année 2007, quand est annoncé que la Paramount a de nouveau considéré le projet, mais sans prendre de décision. A cette occasion, Winston Groom a démenti la rumeur de mauvaise ambiance empêchant la mise en route du projet. Notamment dans un mail envoyé à Cinemablend où il insistait :
Il n’y a jamais eu de dispute entre moi et Paramount Pictures qui aurait causé du retard concernant la production d’un film de Gump & Company, la suite de Forrest Gump. Les studios ont acheté les droits et m’ont payé une tonne d’argent avant même qu’il ne sorte, et ils les détiennent depuis, et ils pourront en faire un film quand bon leur semblera.
Dans un état végétatif depuis plus de douze ans, il semble aujourd’hui improbable de voir un jour ce projet se faire, aux grands regrets de ceux qui n’ont jamais perdu espoir de revoir Tom Hanks reprendre un de ses plus grands rôles…