On y pensait déjà en sortant d’Antichrist, ça se confirme après la découverte de Soudain le vide : question polémique, cette année, Gaspar Noé s’est fait couper l’herbe sous le pied par Lars Von Trier ! Car son film se révèle sulfureux certes, mais beaucoup moins trash que l'on pensait. N’empêche, s’il y a bien un truc qui me triture la tête en sortant de la projection officielle, c’est que pour une fois c’est pas du pop-corn mais du LSD qu’il faudrait vendre à l’entrée. Car sept ans après le scandale Irréversible et ses 15 minutes de viol en gros plan, l’enfant terrible du cinoche français nous invite cette fois à une descente aux enfers hallucinogène et « hallucinatoire ».
L’histoire de base est simple : un dealer sans grande envergure se fait shooter par un policier, et son âme continue de flotter dans les airs pour veiller sur sa petite sœur strip-teaseuse. Mmouais. Et Gaspar Noé tient 2h45 avec ça ? Et bien oui, même si – et c’est sans doute le gros défaut du film – le rythme est incroyablement lent, et qu’une heure de bad trip de moins n’aurait pas été de refus. En revanche, la narration elle, est tout bonnement affolante. Dès les premières scènes, Gaspar Noé impose son parti-pris : raconter son histoire en caméra subjective puis coller au plus près au dos de son personnage – un personnage qu’on ne verra que très peu de face finalement. "L'idée c'était de suivre le point de vue de quelqu'un qui tombe dans la drogue et qui tourne mal." C’est surtout l’occasion pour le réalisateur de ressasser une nouvelle fois les thèmes que le perturbent depuis des années – il a commencé à écrire ce scénario il y a 15 ans – le sexe, la drogue, le sexe sous emprise de la drogue, l’inceste, l’amour (quand même), le sexe sauvage, et bien sûr, la mort.
Très vite, on vire dans le film expérimental, avec une caméra qui flotte, virevolte, se faufile, disparaît, s’extasie, s’agite devant les lumières, encore et encore. Le tout dans un Tokyo by night ultra graphique, baigné par la lumière éclatante des néons… "On a dû recréer la plupart des décors en studio avec des grues. Il n'y a pas un plan qui n'est pas truqué dans mon film… Il y a aussi un élément que je n'ai pas vu beaucoup au cinéma, c'est la stroboscopie". Et oui, gare aux crises d’épilepsie, car si Gaspar Noé nous avait habitué aux plans expérimentaux (Seul contre tous, Irréversible…) ici le déluge de lumière, l’accumulation des flous et le jeu du montage sont tout bonnement hypnotisant. Ce n’est plus un film, c’est une expérience surnaturelle… 2h45 plus tard (oui, encore une fois, c’est long, c’est très long), on a l’impression d’avoir été hypnotisé. Dans la salle, les sifflets se mêlent aux applaudissements, et de ma place je vois Gaspar Noé jubiler. Provoquer des réactions, c’est pour cela qu’il fait du cinéma. En revanche, comme on sait que la version présentée à Cannes n’est pas définitive, on va se permettre de lui donner un petit conseil : COUPE dans le tas !
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Aurélie Vautrin (Cannes, 23 mai 2009)