Après avoir atteint les sommets, Michael Cimino a sombré à cause de l'échec de "La Porte du paradis", et son retour avec "L'Année du dragon" n'a pas été plus glorieux malgré ses qualités indéniables.
Michael Cimino : de héros à zéro
Michael Cimino n'a pas eu besoin de beaucoup de films pour marquer l'Histoire du cinéma hollywoodien. Après avoir convaincu Clint Eastwood en le dirigeant dans son premier long-métrage Le Canardeur (1974), le cinéaste a créé un immense chef-d'œuvre avec Voyage au bout de l'enfer (1978). C'est le film qui changea la carrière de Michael Cimino. Car suite à cet immense succès (5 Oscars et un carton au box-office), le réalisateur s'est retrouvé au sommet avec la possibilité de faire ce qu'il voulait, obtenant une liberté totale de la part de United Artists. Sauf que son film suivant, le grandiose La Porte du paradis (1980), a été un désastre financier, mettant quasiment un terme à la carrière du réalisateur.
Mis au ban par Hollywood, il lui faudra quelques années pour revenir avec L'Année du dragon (1985), qui malgré son échec, demeure probablement le dernier grand film de son auteur. Suivront ensuite Le Sicilien (1987), La Maison des otages (1990) et The Sunchaser (1996), et des apparitions de plus en plus rares avant sa mort le 2 juillet 2016 à 77 ans. Jean-Baptiste Thoret lui rendra hommage plus d'une fois, avant de lui consacrer son documentaire Michael Cimino, un mirage américain (2022).
Mais revenons à L'Année du dragon, ce polar noir, ultra-violent et polémique. Mickey Rourke y joue un policier vétéran de la guerre du Viêt Nam, et fils d'immigrés polonais. Une sorte de descendant direct des deux précédents films de Michael Cimino donc. Mais cet homme adopte des méthodes peu conventionnelles pour lutter contre la mafia chinoise. Par la brutalité du personnage et son rapport à cette communauté, le film sera considéré comme raciste par une partie des spectateurs qui n'auraient peut-être pas bien compris ce qu'est le cinéma de Cimino...
L'Année du dragon, un polar à réhabiliter
En effet, le réalisateur ne représente pas des héros à la moralité exemplaire, mais bien des personnages complexes et problématiques pour traiter de thématiques comme la décadence, la corruption, l'aliénation ou encore l'amoralité du système capitaliste. Pour incarner le capitaine Stanley White, Michael Cimino a opté pour Mickey Rourke, qu'il avait déjà dirigé dans La Porte du paradis. L'acteur offre là une prestation solide face à John Lone et Ariane Koizumi.
Produit avec un budget d'environ 22 millions de dollars, le film n'en a rapporté que 18 millions au box-office américain, mais a tout de même attiré en France quasiment 2 millions de spectateurs. C'est justement en Europe que L'Année du dragon a été davantage reconnu à sa juste valeur. Jérémie Guez, réalisateur de B.R.I, nous parlait d'ailleurs de l'influence du film. Tandis qu'aujourd'hui encore, une partie de la presse continue de réhabiliter le film. Comme le site Avoir-àlire qui écrivait très justement en 2016 :
En regardant ce film, on ne peut s'empêcher d'y voir une allégorie de la carrière de Michael Cimino. Esseulé suite à l'échec de La porte du paradis, mis au banc par ses pairs (tout comme Stanley White), il a dû lutter pour retrouver les chemins des plateaux de cinéma. L'année du dragon prouve seulement son talent et son absence totale de compromissions.
Pour pousser plus loin l'analyse, on vous conseille de prendre le temps d'écouter la présentation du film par Jean-Baptiste Thoret, en 2015, au Centre des arts d'Enghie, disponible ci-dessous :