En 2012, Xavier Dolan faisait sensation au Festival de Cannes avec "Laurence Anyways". Ce film poignant, explorant l’histoire d’amour d’un homme en pleine transition de genre, reçoit la Queer Palm. Pourtant, le réalisateur québécois refuse catégoriquement cette récompense. Retour sur les raisons de ce choix controversé alors que le film est diffusé ce soir sur France 4
Laurence Anyways : quand Xavier Dolan refusait un prix
Lors du Festival de Cannes 2012, Laurence Anyways, troisième long-métrage de Xavier Dolan, est projeté dans la section Un Certain Regard. Le film est salué pour sa richesse visuelle et émotionnelle, ainsi que pour les performances bouleversantes de Melvil Poupaud et Suzanne Clément. Mais alors qu’il reçoit la Queer Palm, une récompense honorant les films abordant des thématiques LGBTQ+, Dolan refuse de l’accepter.
Dans une déclaration qui fait grand bruit, le réalisateur explique : « Que de tels prix existent me dégoûte. » Pour lui, la Queer Palm, bien qu’animée par des intentions louables, contribue à marginaliser les œuvres traitant de questions LGBTQ+ en les isolant dans une catégorie spécifique. Il considère que ce prix, au lieu d’intégrer ces thématiques dans le cinéma universel, les stigmatise en les confinant à un espace "à part".
Cette prise de position reflète la vision de Dolan : le cinéma n’a pas à distinguer les histoires selon les identités ou orientations sexuelles qu’elles représentent. Il estime que ses films – et d’autres œuvres abordant ces sujets – méritent d’être jugés uniquement pour leurs qualités artistiques et narratives, au même titre que n’importe quelle autre production.
Laurence Anyways : un chef-d’œuvre universel
L’ambition de Xavier Dolan de transcender les étiquettes trouve un écho dans le sujet même de Laurence Anyways. Le film raconte l’histoire de Laurence Alia (Melvil Poupaud), un professeur qui révèle à sa compagne Fred (Suzanne Clément) son désir de transitionner pour devenir une femme. Ce récit explore avec une rare intensité les bouleversements que cette annonce provoque dans leur relation, ainsi que les discriminations et les regards oppressants de la société.
Au-delà de la thématique LGBTQ+, le film aborde des enjeux universels : la quête d’identité, l’amour face à l’adversité et la difficulté d’être soi-même dans un monde souvent normatif. Grâce à une mise en scène flamboyante et à des dialogues d’une rare profondeur, Dolan livre une œuvre aussi personnelle qu’universelle.
Laurence Anyways reçoit d’ailleurs d’autres récompenses à Cannes, notamment le Prix d’interprétation féminine de la section Un Certain Regard, attribué à Suzanne Clément. Cette dernière offre une prestation inoubliable, incarnant une femme déchirée entre l’amour qu’elle porte à Laurence et les sacrifices que cette relation exige.
Le refus de la Queer Palm par Xavier Dolan a toutefois suscité des débats. Si certains ont salué son ambition de normaliser les récits LGBTQ+ dans le cinéma, d’autres ont estimé que ce type de distinction reste essentiel pour donner de la visibilité à des thématiques encore sous-représentées.