Pour une scène marquante du film "Le Bon, la brute et le truand", Sergio Leone a souhaité détruire un pont en bois. En raison d'une boulette d'un capitaine de l'armée espagnole, le cinéaste a bien failli ne jamais filmer ce moment.
Le Bon, la brute et le truand, un monument de Sergio Leone
En 1966 sortait en Italie Le Bon, la brute et le truand. En France, il faudra attendre deux ans pour découvrir ce chef-d'œuvre de Sergio Leone. Troisième opus de la trilogie du dollar, le film met à nouveau en scène Clint Eastwood dans le rôle de "l'homme sans nom", surnommé Blondin par son complice Tuco, incarné lui par Eli Wallach. Face à eux, on retrouve également Lee Van Cleef dans le rôle de "la brute" Sentenza. L'acteur interprète ici un personnage totalement différent de celui d'Et pour quelques dollars de plus (1965), et se démarque par sa cruauté.
Le Bon, la brute et le truand permet donc à Sergio Leone de conclure sa trilogie mais également de porter un regard sombre et critique sur la guerre. En effet, le film se déroule en pleine guerre de Sécession, qui a vu des centaines de milliers de soldats être tués. Au milieu de cet événement, Blondin, Tuco et Sentenza vont tout faire pour atteindre un cimetière où est enterré un coffre rempli de pièces d'or. Mais avant ce final mythique, marqué par la course inoubliable d'Eli Wallach au milieu des tombes et sous la musique d'Ennio Moricone The Exstasy of Gold, Tuco et Blondin auront un pont à franchir.
Un pont que se disputent les forces confédérées et celle de l'Union car les généraux pensent que la finalité de la guerre se décidera avec ce pont. Obligé de suivre les ordres, le capitaine nordiste envoie ainsi ses hommes se faire massacrer par centaines. Comme expliqué dans le documentaire d'Arte, Sergio Leone - Une Amérique de légende, le réalisateur dénonce ici "l'imbécilité des états-majors qui envoient les hommes à la mort pour un enjeu absurde".
Une première explosion qui n'a pas été filmée
Le cinéaste offre dans un premier temps une séquence aussi impressionnante qu'effroyable avec tous ces hommes qui affluent en direction du pont et tombent les uns après les autres. Blondin y va d'ailleurs de sa réplique cynique au possible : "J'avais encore jamais vu crever autant de monde". Une seule solution s'offre alors à blondin et Tuco, et sous la demande du capitaine dans un dernier souffle : détruire ce pont. Un véritable feu d'artifice à l'écran. Et une bonne galère pour Sergio Leone au moment du tournage. Le cinéaste a d'abord fait construire ce pont imposant mais, celui-ci était tellement solide, qu'il ne parvenait pas à le faire sauter.
Un capitaine de l'armée espagnole est alors intervenu. Ce dernier, sûr de lui, dit à Sergio Leone de ne pas s'en faire et qu'il allait se charger de faire sauter le pont. Le problème, c'est que le militaire n'a pas attendu que le réalisateur soit prêt à tourner pour déclencher l'explosion, provocant évidemment la colère de Sergio Leone, comme il le racontait en interview (utilisé dans le documentaire Une Amérique de légende) :
En pleine préparation, à attendre d'avoir la bonne luminosité, j'entend une explosion. Et les caméras ne tournaient pas. Je voulais presque tuer le capitaine. Il a vu dans mes yeux le regard de la mort donc il m'a dit : ne vous en préoccupez pas, en trois jours je reconstruis le pont.
Le capitaine a alors fait venir des centaines de soldats pour reconstruire le pont avant de le détruire à nouveau, avec cette fois les caméras bien en marche pour immortaliser ce moment.