Depuis 1964, chaque sortie d’un opus de la saga "Le Gendarme" est attendue par le grand public. Sauf que pour "Le Gendarme se marie", la sortie se fait la même année que des mouvements contestataires importants survenus en France. Et forcément, cela a eu une incidence sur le tournage, au grand dam de Louis de Funès.
Le Gendarme se marie : et de 3 !
En 1964 et en 1965, Le Gendarme de Saint-Tropez et Le Gendarme à New York sont deux importantes réussites au box-office, confirmant l’idée de la naissance d’une franchise à succès. En effet, qui aurait cru que les comédies réalisées par Jean Girault seraient aussi bien accueillies, faisant de Louis de Funès l’acteur le plus populaire de France ? Jean Girault, son co-scénariste Jacques Vilfrid, et leur partenaire Richard Balducci discutent donc d'un troisième volet. Plusieurs idées fleurissent, dont celle de voir Cruchot se marier. Ils décident donc de lancer un sondage dans la presse, et de laisser le public se décider. Ce dernier choisit le mariage : la production de Le Gendarme se marie peut alors commencer.
La comédie suit donc le maréchal Cruchot qui fait la rencontre de Josépha, la veuve d’un colonel de gendarmerie. Il tombe ainsi sous son charme et est prêt à lui faire la cour. C’est oublier très vite tous les tracas qui peuvent arriver à Saint-Tropez.
Avec 6,8 millions d’entrées, Le Gendarme se marie est une nouvelle fois un triomphe. Il devient le second film le plus lucratif de la saga et est même considéré comme son meilleur épisode. À la distribution, on retrouve les acteurs du précédent épisode : Louis de Funès, Michel Galabru, Jean Lefebvre, Christian Marin, Guy Grosso, Michel Modo, Geneviève Grad et France Rumilly. Ces derniers sont accompagnés par une petite nouvelle : Claude Gensac, qui joue Josépha, et qui est connue pour régulièrement jouer avec Louis de Funès.
Quand Mai 68 vient gâcher la fête
À cette période, le pays est secoué par de nombreuses grèves et révoltes menées principalement par les populations étudiantes et ouvrières, contre les réformes socio-économiques opérées par le gouvernement de Gaulle. Bien que le plus gros de la révolte se mène à Paris, c’est tout l’Hexagone qui est en réalité concerné et touché par ces évènements. Cependant, estimant que la population de Saint-Tropez (réputée bien plus aisée que celle de la capitale) se moque royalement de ce mouvement, la production décide de ne pas repousser le tournage et de le commencer… le 20 mai 1968, à la date prévue initialement.
Seulement, deux jours après, les prises de vue sont stoppées. En cause, les syndicats qui font pression sur les techniciens et les machinistes pour faire grève.
Alors que la plupart des tournages en France sont interrompus, le producteur de la saga, Michel Galabru et surtout Louis de Funès sont farouchement contre. Ce dernier menace même de ne pas embaucher les potentiels grévistes sur les prochains volets de la saga Le Gendarme. La grève est pourtant votée, au grand dam de l’acteur, qui, pour se révolter, continue à se rendre chaque jour sur le plateau pour faire son travail. C’est finalement son vieil ami Daniel Gélin qui parvient à trouver les mots pour l’enjoindre à soutenir les grévistes. L'arrêt de la grève sera finalement prononcé le 6 juin, étant donné que la majorité des travailleurs sur ce tournage ont besoin d’argent. Louis de Funès, quant à lui, met ses menaces à exécution et ne réengage pas la majorité des grévistes sur les films suivants.
La peur folle de Louis de Funès
Si cet épisode de Le Gendarme se marie montre que l’acteur peut être semblable à certains des personnages avares et acariâtres qu’il interprète, SoFilm rappelle également que Louis de Funès tombe totalement dans la paranoïa à cette période. En effet, l’acteur, ayant peur pour sa fortune, enterre dans son jardin un coffre-fort rempli d’argent et de lingots d’or !
Les évènements de Mai 68 relancent alors sa frayeur. Ainsi, durant le tournage du film, il va voir Jean Girault et lui demande de déterrer son coffre-fort pour le mettre en lieu sûr. Cependant, malgré les indications du comédien, il ne retrouve pas le coffre. Par la suite, au cours de l’année, il est victime d’un maître chanteur nommé Jacques Robert qui veut s’en prendre personnellement à lui. Le journaliste Bertrand Dicale, auteur de la biographie Louis de Funès : grimaces et gloire déclare à ce sujet :
En cette période de contestations tous azimuts, cet homme recycle son trouble personnel en un discours de grande virulence politique.
Lui réclamant 150 000 francs, il est finalement condamné à 18 mois de prison pour extorsion de fonds. Quelle année pour l’acteur !