Le Train sifflera trois fois : pourquoi John Wayne haïssait le western culte ?

Le Train sifflera trois fois : pourquoi John Wayne haïssait le western culte ?

Sorti en 1952, "Le Train sifflera trois fois" remporte quatre Oscars et s'impose comme une référence du western. Pas pour John Wayne, qui éprouve une aversion particulière pour le film.

Le Train sifflera trois fois : un shérif seul contre tous

Long-métrage qui se déroule quasiment en temps réel, Le Train sifflera trois fois débute aux alentours de 10h40, dans la petite ville d'Hadleyville. Alors qu'il vient de se marier avec la quaker Amy Fowler (Grace Kelly), le marshal Will Kane (Gary Cooper) apprend que le criminel Frank Miller (Ian MacDonald) a été libéré après cinq ans d'emprisonnement. Ce dernier se dirige vers Hadleyville et arrivera par le train de midi pour abattre Kane, responsable de son arrestation.

Sur le point de rendre son étoile de shérif, le héros décide de la conserver pour cet ultime duel. Il demande de l'aide à plusieurs habitants pour faire face à Miller et sa bande. Néanmoins, tous refusent et le laissent seul avec Amy pour les affronter.

Le Train sifflera trois fois
Will Kane (Gary Cooper) - Le Train sifflera trois fois ©Paramount Pictures

Lloyd Bridges, Thomas Mitchell, Katy Jurado et Lee Van Cleef complètent la distribution du western de Fred Zinneman récompensé par 4 Oscars en 1953 : Meilleur acteur, Meilleur montage, Meilleur chanson originale et Meilleure bande originale. Une consécration qui relance la carrière de Gary Cooper avec Les Aventures du Capitaine Wyatt et qui ne plaît pas du tout à une autre figure emblématique du genre.

Un western détesté par John Wayne

Si John Wayne ne supporte pas Le Train sifflera trois fois, c'est parce que le film est une parabole de la chasse aux sorcières et que le star est un fervent représentant de l'anticommunisme à Hollywood. Soutien du sénateur McCarthy, l'acteur préside notamment la Motion Picture Alliance for the Preservation of American Ideals (l'Alliance cinématographique pour la préservation des idéaux américains) entre 1949 et 1953, ce qui lui vaut d'ailleurs un ordre d'exécution de la part de Staline et plusieurs tentatives d'assassinat.

Le Train sifflera trois fois
Will Kane (Gary Cooper) - Le Train sifflera trois fois ©Paramount Pictures

Même s'il accepte la statuette de Gary Cooper en son absence lors des Oscars, John Wayne ne croit donc absolument pas en l'histoire du Train sifflera trois fois pensée par Carl Foreman, scénariste blacklisté et accusé d'être membre du Parti communiste. Pour lui, le récit d'un shérif qui voit ses habitants lui tourner le dos, d'un individu isolé face à une collectivité craintive et désunie, ne fait absolument pas sens et ne reflète surtout en rien l'esprit et le mythe américains. Lors d'une interview accordée à la BBC en 1974 et citée par l'Express, le comédien explique sa colère envers le film et déclare :

Toute une ville de personnes qui ont traversé les plaines et subi toutes sortes de difficultés ont soudainement peur d'aider un shérif parce que trois durs arrivent en ville. (...) Je ne... je ne pense pas que cela se soit déjà produit aux États-Unis. Et à la fin du film, il prend son insigne de marshal, la jette, la piétine et s'en va. Je pense que ces choses sont juste un peu anti-américaines.

Rio Bravo en guise de réponse

En 1959, sept ans après Le Train sifflera trois fois, John Wayne retrouve Howard Hawks après La Rivière rouge pour un autre western devenu culte, Rio Bravo. L'acteur y incarne le shérif John T. Chance, un shérif qui ne compte surtout pas demander d'aide pour affronter une bande de tueurs, s'appuyant uniquement sur son adjoint Dude (Dean Martin), sur le jeune tireur Colorado Ryan (Ricky Nelson) et sur le vieux Stumpy (Walter Brennan).

Un long-métrage qu'Howard Hawks décrit comme une réponse au film de Fred Zinneman. Au-delà de mettre en scène un personnage principal qui ne doute jamais, Rio Bravo se veut aussi moins désabusé sur sa peinture de l'Ouest américain, dévoilant ainsi un point de vue opposé au Train sifflera trois fois.