Mourir d'aimer : la tragique histoire vraie derrière le film avec Annie Girardot

Mourir d'aimer : la tragique histoire vraie derrière le film avec Annie Girardot

Le film Mourir d'aimer, réalisé par André Cayatte et sorti en 1971, s'inspire d'un fait divers tragique qui a profondément marqué la société française à la fin des années 1960 : l'affaire Gabrielle Russier. Il est diffusé ce soir sur Arte.

Mourir d'aimer : l'affaire Gabrielle Russier

En 1968, Gabrielle Russier, professeure agrégée de lettres de 32 ans au lycée Nord de Marseille, entame une relation amoureuse avec Christian Rossi, l'un de ses élèves âgé de 17 ans. Leur proximité s'intensifie lors des événements de Mai 68, période durant laquelle ils participent ensemble à des manifestations.

Cette relation, bien que consentie, est perçue comme scandaleuse par la société de l'époque. Les parents de Christian, opposés à cette liaison, saisissent le juge pour enfants en octobre 1968. Un compromis est trouvé : Christian est envoyé en internat au lycée d'Argelès, avec la possibilité de correspondre avec Gabrielle et de la voir pendant les vacances de la Toussaint. Cependant, les lettres de Gabrielle sont interceptées, ce qui pousse Christian à menacer de se suicider.

En décembre 1968, Gabrielle Russier est inculpée pour détournement de mineur et incarcérée à la prison des Baumettes. Elle est libérée cinq jours plus tard grâce à l'intervention de Christian auprès du juge pour enfants. Malgré les interdictions, Gabrielle et Christian continuent de se voir. Les parents de Christian décident alors de le placer dans différents instituts, puis de l'interner dans une clinique psychiatrique où il subit une cure de sommeil de trois semaines. Malgré ces obstacles, le couple persiste dans sa relation, ce qui conduit à une nouvelle incarcération de Gabrielle en avril 1969 pour avoir refusé de révéler la cachette de Christian. Elle passe au total cinquante jours en détention.

Le 10 juillet 1969, Gabrielle comparaît devant le tribunal correctionnel de Marseille, qui siège à huis clos. Elle est condamnée à 12 mois de prison avec sursis et à une amende. L'Académie d'Aix-en-Provence refuse de la réintégrer, et le parquet fait appel de la décision, sous la pression du recteur Paul Frank. Face à cet acharnement judiciaire et institutionnel, Gabrielle Russier se suicide le 1ᵉʳ septembre 1969 en s'asphyxiant au gaz dans son appartement. Son décès suscite une vive émotion et relance le débat sur la rigidité des normes sociales et judiciaires de l'époque.

Mourir d'aimer : de l'affaire au grand écran

Profondément touché par cette tragédie, le réalisateur André Cayatte décide de porter cette histoire à l'écran. Dans Mourir d'aimer, les noms des protagonistes sont modifiés : Gabrielle Russier devient Danièle Guénot, interprétée par Annie Girardot, et Christian Rossi est renommé Gérard Leguen, joué par Bruno Pradal. Le film transpose également l'action de Marseille à Rouen.

Sorti en janvier 1971, le film rencontre un immense succès, attirant près de 6 millions de spectateurs en France. Il est salué pour sa dénonciation de l'intolérance sociale et de l'injustice judiciaire. La performance d'Annie Girardot est particulièrement remarquée, et renforce sa popularité auprès du public.

Une nouvelle adaptation télévisuelle par Josée Dayan

En 2009, la réalisatrice Josée Dayan propose une nouvelle adaptation de cette histoire avec le téléfilm Mourir d'aimer, diffusé sur France 2. Dans cette version, Muriel Robin incarne Gabrielle Delorme, une professeure de lettres de 42 ans, divorcée et mère de deux enfants, qui tombe amoureuse de Lucas Malzieu, un élève de 15 ans et demi.

L'action est transposée au début des années 1980 à Angoulême, et offre une relecture contemporaine du drame. Cette adaptation souligne la persistance des questions liées à l'amour interdit, à la morale et à la justice, même des décennies après les faits originaux.