"Orange mécanique" a marqué les spectateurs par sa violence et son ambiance malsaine. Pour les 50 ans de sa sortie, on vous offre trois secrets du tournage du film de Stanley Kubrick.
Orange mécanique : à la source du mal
Orange mécanique est un film de Stanley Kubrick adapté du roman du même nom d'Anthony Burgess. La version du réalisateur est très fidèle à l’œuvre originale. L'histoire se passe en Angleterre, dans un futur proche. Alex DeLarge (Malcolm McDowell) est un jeune délinquant adepte de l'ultraviolence et obsédé par le sexe. Il est également et accessoirement passionné par les compositions classiques de Beethoven, qu'il appelle "Ludwig Van" quand il lui fait référence.
Alex est le chef des Droogs, une bande de malfaiteurs au sang chaud complétée de Pete (Michael Tarn), Georgie (James Marcus) et Dim (Warren Clarke). Ils mènent une vie urbaine et décadente et parlent le nadsat, un argot mélangeant l'anglais et le russe. Lors d'une soirée qu'ils passent à se saouler au Moloko Plus, un lait drogué au speed, ils se perdent dans les limbes du mal, multipliant les actes répréhensibles, passant du meurtre au viol sans broncher une seconde.
Le casting est complété par Adrienne Corri, Patrick Magee, Anthony Sharp, Aubrey Morris, Carl Duering, Clive Francis et David Prowse. Orange mécanique marqua les esprits par ses scènes chocs et sa violence graphique. Le film ne voulait en aucun cas la glorifier, mais certains y ont vu le message contraire. Les vrais actes de violence de personnes déguisées en Droogs se multipliant à l'époque en Angleterre, Kubrick supplia la Warner d'enlever le film des cinémas. Ce qui arriva. En France, c'est un triomphe avec plus de 7,6 millions de spectateurs en salle. Un film culte, un vrai.
Le seul et unique
Avant que Kubrick n'entreprenne l'adaptation d'Orange mécanique, Ken Russell et John Schlesinger étaient parmi les réalisateurs envisagés. Une rumeur annonçait même que Mick Jagger pourrait enfiler le costume d'Alex, avec d'autres membres des Rolling Stones jouant potentiellement les Droogs. Mais lorsque le metteur en scène de Spartacus a rejoint le projet, il ne voulait qu'un seul homme pour jouer Alex : Malcolm McDowell. Kubrick l'a vu dans If... de Lindsay Anderson dans lequel il joue un adolescent rebelle et violent. McDowell n'a même pas eu à auditionner et si l'acteur avait refusé le rôle, Kubrick aurait complètement abandonné le projet.
Un acteur influent
Le choix de McDowell pour Orange mécanique fut un coup de génie pour Stanley Kubrick. Car encore plus par son talent d'acteur, le comédien a influencé le film par ses trouvailles. Avant le début du tournage, la créatrice des costumes Milena Canonero souhaitait insuffler à ceux du film l'idée d'une société étrange dans un futur pas très éloigné de celui de 1970. Mais Kubrick et Canonero ont eu du mal à cerner l'apparence du costume d'Alex. Lors des essais, McDowell, joueur de cricket, leur a dit qu'il avait son équipement dans sa voiture. Il a donc ramené sa chemise et sa coquille de protection qu'il cache sous son pantalon. Kubrick lui proposa alors de la mettre en évidence, plutôt par dessus. Le look culte d'Alex est né ainsi !
Autre addition de la part McDowell, l'idée que son personnage chante pendant la scène du viol de la femme de l'écrivain vient de lui. Lors des répétitions, Stanley Kubrick trouvait que cette scène, pourtant infâme, était un peu plate et qu'il manquait un petit quelque chose pour souligner la nature violente et sinistre du personnage d'Alex. Il propose à McDowell de danser et ce dernier rajoute sa touche en chantant Singin 'in the Rain de Gene Kelly. Une apparition impromptue de ce classique guilleret qui rend la scène encore plus scandaleuse. Pourquoi cette chanson en particulier ? Parce que c'était la seule dont l'acteur connaissait les paroles par cœur.
You're the boss of me now
Quand on est autant révéré par son réalisateur, il est de coutume de le rendre à l'écran avec de nombreux sacrifices, tout en suivant ses conseils les yeux fermés. Malcolm McDowell s'est donc donné à 100%, mais plutôt les yeux ouverts. Pour la scène dans laquelle Alex est obligé de regarder des images horribles comme thérapie par aversion, ses paupières ont été maintenues ouvertes avec des pinces en métal. Le Dr Gundry, qui lui administrait les gouttes ophtalmiques, était un vrai médecin du Moorfields Eye Hospital de Londres. Il était censé rester hors écran, mais Kubrick l'a finalement mis en scène parce que McDowell aurait été incapable de garder les yeux ouverts sans les gouttes.
Bien que ses yeux aient été anesthésiés, McDowell a été contraint d'endurer une douleur atroce et s'est blessé à la cornée. Il est même devenu aveugle pendant quelques instants. Les pinces oculaires n'étaient censées être utilisées que pour des patients allongés, mais Kubrick insista pour que le personnage soit assis lors de sa rééducation. Le calvaire physique fut total pour McDowell qui eut également plusieurs côtes cassées durant la scène d'humiliation sur la scène du théâtre. La violence d'Orange mécanique, pour lui, était bien réelle !