Chef-d'œuvre de l'animation japonaise, "Perfect Blue" de Satoshi Kon aurait pu avoir droit à un remake live signé Darren Aronofsky. À la place, le réalisateur américain a rendu hommage au film avec "Requiem for a Dream".
Satoshi Kon, immense cinéaste parti trop tôt
En seulement quatre longs-métrages et une série télévisée, le Japonais Satoshi Kon (1963-2010) a eu une grande influence sur le cinéma. Que ce soit dans l'animation ou le cinéma américain, le réalisateur a laissé sa trace. Et ce, bien que ses films n'aient pas vraiment connu de succès au moment de leur sortie. Perfect Blue (1997) en est un exemple parfait. Dans ce thriller paranoïaque et schizophrénique, Mima, une chanteuse de J-pop, décide de se lancer dans une carrière d'actrice. Mais son choix ne va pas plaire à tout le monde. Après avoir reçu un fax la traitant de "traîtresse", des personnes proches d'elle commencent à être assassinées.
Avec ce film, Satoshi Kon remet en question le principe des "idoles" au Japon. Ces jeunes filles fabriquées pour devenir des stars de la musique dans des groupes, qui suscitent un engouement monstrueux, mais peuvent être remplacées du jour au lendemain. Le cinéaste met également en scène un inquiétant stalker et provoque un véritable malaise avec cette héroïne (représentation de Kon lui-même) qui perd pied sous la pression, et voit la réalité se confondre avec la fiction dans laquelle elle tourne.
L'influence sur Aronofsky
En (re)voyant Perfect Blue aujourd'hui, on pense aisément à d'autres films produits depuis. Le Black Swan (2010) de Darren Aronofsky en est un bon exemple. Pas si surprenant étant donné que le réalisateur américain voue un intérêt particulier pour le film depuis qu'il l'a découvert. Dans le documentaire Satoshi Kon, l'illusionniste, le cinéaste raconte avoir été marqué par la proposition de Satoshi Kon. Au point d'avoir tenté de réaliser un remake en version live.
Nous avons essayé d'obtenir les droits pour tourner une version en prises de vue réelles. C'était très compliqué, car personne ne comprenait ce qu'était une pop star ou ce genre de personnage. C'était avant le phénomène Britney Spears en Amérique. Nous n'avions pas ce type de personnage, et pour le public c'était dur à comprendre.
Si son projet n'a pas pu se faire, Aronofsky a tout de même pu reprendre des éléments de Perfect Blue. Dans l'intrigue et l'ambiance de Black Swan - en passant d'une pop star à une danseuse étoile. Mais également avec Requiem for a Dream (2000). Pour son second long-métrage, il a reproduit l'un des plans de Perfect Blue. Une scène où Mima hurle dans sa baignoire, reprise à l'identique avec Jennifer Connelly.
Un hommage assumé et fait avec l'accord de Satoshi Kon. Durant l'écriture du scénario de Requiem for a Dream, il cherchait une scène pour "figurer l'état du personnage de Jennifer Connelly". Ayant vu au même moment Perfect Blue, il a écrit à Satoshi Kon pour pouvoir réutiliser ce plan.
Il était très flatté. Il a été très généreux. Je lui ai demandé ce qu'il pensait du plan, il m'a dit qu'il était très fier.
Pour en découvrir davantage sur Satoshi Kon, outre sa passionnante filmographie, on vous conseille le documentaire de Pascal-Alex Vincent comme mise en bouche, disponible en DVD et Blu-ray.