Diffusé ce soir sur France 5, "Petit Paysan" (2017) est le premier long-métrage d'Hubert Charuel. Un drame rural qui se déroule dans un milieu bien connu du réalisateur.
Petit Paysan : excellent premier film
Pour son premier long-métrage, Hubert Charuel a fait fort. Avec Petit Paysan (2017), le réalisateur est parvenu à proposer un drame rural prenant, qui tend remarquablement vers le thriller, et qui a convaincu la grande majorité. Si le presse ne s'est pas trompé à son sujet, qualifiant le film de "bijou" (Le Parisien), de "premier film poignant" (Ouest France) ou encore de "thriller haletant" (Studio Ciné Live), le public était aussi au rendez-vous lors de sa sortie en salles.
Avec plus de 547 000 entrées en France, Petit Paysan a fait un bon score pour ce genre de production, avant d'être sacré à trois reprises aux César en 2018 - meilleur premier film, meilleur acteur pour Swann Arlaud et meilleure actrice dans un second rôle pour Sara Giraudeau.
Pourtant, il n'était pas gagné que le public s'intéresse à cette histoire de Pierre (Swann Arlaud), un paysan qui a repris l'exploitation de ses parents et doit gérer seul une trentaine de vaches laitières. Si sa sœur Pascale (Sara Giraudeau), vétérinaire, le soutien, elle ne pourra rien faire lorsqu'une de ses vaches développe un comportement étrange. L'animal souffrant de FHD (fièvre hémorragique dorsale) Pierre comprend que si cela se sait, les autorités sanitaires abattront tout son troupeau par précaution. Il va donc cacher la vérité et rentrer dans une spirale infernale.
Hubert Charuel, de la ferme à La Fémis
Pour imaginer ce récit, Hubert Charuel n'est pas allé bien loin pour trouver l'inspiration. Il est en effet le fils unique de paysans, qui ont une ferme à Droyes. Mais plutôt que de reprendre, comme Pierre, l'exploitation de ses parents, Hubert Charuel s'est tourné vers le cinéma en entrant à La Fémis. Et ce, en dépit de six mois, en 2008, durant lesquels il a dû remplacer sa mère. D'ailleurs, comme il l'expliquait dans le dossier de presse du film : "Le personnage est différent de moi dans ses réactions et la manière dont il parle, mais la vie de Pierre est évidemment celle que j’aurais dû avoir si je n’avais pas décidé de faire du cinéma. Son rapport aux animaux, sa relation avec ses parents nous rapprochent".
De plus, pour tourner Petit Paysan, le cinéaste s'est rendu directement dans la ferme de ses parents. Même si après la retraite de son père, sa mère a envoyé ses bêtes dans une autre exploitation, ils ont pu bénéficier du "décors (qu'il) connait le mieux".
Une fausse maladie inspirée de la vache folle
Vient alors l'élément déclencheur du film, avec l'apparition de symptômes sur l'une des vaches du film. Même si la crise de la vache folle a grandement marqué Hubert Charuel, se souvenant de sa mère dire alors qu'il n'a que 10 ans "Si ça arrive chez nous, je me suicide", le réalisateur n'a pas voulu faire un film sur la crise de la vache folle ou sur la fièvre aphteuse. Celle-ci ayant été un vrai traumatisme pour les paysans, qui voyaient les vétérinaires venir, creuser une fosse au milieu de la ferme et jeter les corps des vaches tuées avant de les brûler sur place.
On ne fait plus comme ça. Dans le scénario, on a donc imaginé une « fièvre hémorragique », on s’est inspiré d’une maladie qui touche les veaux, mais qui se soigne, dont l’un des symptômes est un saignement au niveau du dos. Il nous fallait un symptôme identifiable. On n’allait pas reproduire le tremblement d’une vache folle mais il fallait rendre l’épidémie visible, visuelle.
La FHD est donc une maladie fictive, mais suffisamment crédible pour que le spectateur comprenne les risques, et que l'inquiétude de Pierre devienne palpable. C'est grâce à ce personnage que Petit Paysan penche vers le thriller. Une volonté assumée par Hubert Charuel, qui souhaitait faire basculer le film "du naturalisme à une veine plus thriller, de jouer avec les codes du genre". Tout cela, sans perdre en réalisme, notamment dans les gestes que doit effectuer Swann Arlaud. Raison pour laquelle l'acteur a effectué un stage d'une semaine chez des cousins de la mère du réalisateur. Pendant plusieurs jours, le comédien a ainsi vécu comme un paysan et s'est montré tellement bon dans ce domaine, que "les cousins ne voulaient plus le laisser partir".