Après "Army of the Dead", Zack Snyder poursuit sa collaboration avec Netflix et réalise enfin son grand projet de space opera : "Rebel Moon Partie 1 : Enfant du feu". Un blockbuster conçu comme une grande fête d'action-aventure, entre l'hommage et le joyeux bordel de cinéma.
Zack Snyder, le reboot
Hasard des plannings ou alignement heureux de planètes, le dernier film du DCEU Aquaman et le Royaume perdu sort au cinéma au même moment où Zack Snyder, ex-patron de ce DCEU, présente sur Netflix Rebel Moon Partie 1 : Enfant du feu, premier volet d'une saga SF qui lorgne clairement du côté de Star Wars. Ainsi, alors que l'univers étendu DC qu'il avait lancé chez Warner s'éteint, un autre s'ouvre chez Netflix.
Deux univers qui n'ont rien à voir, si ce n'est qu'ils prouvent que Zack Snyder est un artiste à "univers", un producteur et un réalisateur dont la vision est ambitieuse, étendue, faite de références et de clins d'oeil, en perpétuelle construction. Avec son premier film Rebel Moon, le réalisateur de 300 et de Man of Steel a-t-il réussi à mettre en scène son grand space opera, avec ses galaxies, ses personnages, "ses" directions artistiques - Rebel Moon est paradoxalement saisissant de diversité pour une toute nouvelle création -, sa cohérence aléatoire et surtout sa joie enfantine de s'amuser le plus possible ?
Ça parle de quoi Rebel Moon ?
L'histoire de Rebel Moon est simple. Dans une galaxie régie par un gouvernement impérialiste tyrannique, une petite communauté agricole occupe paisiblement un coin de sa planète indépendante, Veldt. Ce gouvernement et ses forces, constamment en guerre, ont besoin de ressources et arrive un jour dans cette communauté pacifique pour réquisitionner leurs récoltes. Une jeune femme, Kora, dont le passé est mystérieux, va alors partir aux quatre coins de la galaxie pour recruter des guerriers et s'opposer à cet esclavagisme.
Les inspirations sont évidentes et Zack Snyder les assume, exploitant l'univers de Star Wars pour son environnement et l'intrigue du film d'Akira Kurosawa Les Sept Samouraïs. Mais Zack Snyder le fait pour s'amuser lui-même et divertir le plus largement possible, sans souci de cinéphilie. Des références en hommage, et surtout en hommage au spectacle.
Sur ce point de spectacle, Rebel Moon Partie 1 : Enfant du feu est une réussite. Les dirigeants et soldats de l'empire sont mauvais et cruels, et un de ses leaders, l'amiral Atticus Noble (Ed Skrein) se montre parfaitement violent, sadique et machiavélique. Face à lui, la mystérieuse Kora, très compétente au moment de se bagarrer, le sympathique et maladroit Gunnar, fermier qui se joint à elle pour défendre leur village. Leurs aventures vont les mener d'une planète à l'autre, d'une bagarre à l'autre, dans une histoire de recrutement qui, sans être surprenante, est réjouissante à suivre.
Gladiator, Star Wars, Blade Runner, Matrix...
L'enthousiasme de Zack Snyder est communicatif, et tant pis si souvent cela se traduit en un grand désordre d'idées et de représentations. Dans Rebel Moon Partie 1 : Enfant du feu, chaque nouvelle planète, chaque nouveau lieu, à la manière de Star Wars, est en effet l'occasion de découvrir autre chose. Ainsi, chaque planète a sa palette de couleur, ses habitants et leurs propres technologies. Robots, monstres, cyborgs, humains, c'est donc un immense bestiaire qui anime Rebel Moon.
À un moment, on se croirait comme plongés dans les rues froides enserrées d'immeubles monumentaux de Blade Runner. À un autre, on se laisse gagner par le confort chaleureux d'une taverne de chasseurs de primes façon Star Wars. On croirait même, lors d'une séquence de dressage d'une créature mi-cheval mi-oiseau, revoir Harry Potter sur son hippogriffe.
Zack Snyder tire dans tous les sens, regarde dans toutes les directions. Preuve s'il en est qu'il fait preuve d'une légèreté étourdissante, il confie à Djimon Hounsou le rôle d'un ancien général de l'empire devenu gladiateur pour survivre, et dont la tête est mise à prix... Et si la multiplicité des planètes et des mondes "réels" ne devait pas suffire, l'empire qui conquiert et terrorise ces planètes dispose d'une technologie ressemblant à celle de la "matrice" dans les films des soeurs Wachowski.
Une suite pour confirmer (et un director's cut pour transformer ?)
Difficile de reprocher à Zack Snyder cet amusant foutoir de références et son envie de célébrer le cinéma d'aventure et celui de science-fiction. D'autant plus que son casting joue le jeu à fond et se montre convaincant. Sofia Boutella (Kora) et Ed Skrein (Atticus Noble) incarnent parfaitement leurs personnages principaux, l'héroïne et l'antagoniste, et autour de Kora l'équipe constituée est très investie. Charlie Hunnam en charmant trafiquant de l'espace (coucou Han Solo), Bae Doona en guerrière bionique meurtrière, Michiel Huisman en sidekick décalé et amoureux, ou encore Staz Nair en force de la nature capable de se lier aux animaux.
Alors, même si les fonds verts sont très abondamment utilisés, qu'on passe d'un enjeu à l'autre sans se retourner, et que de toute évidence Zack Snyder n'a pas du tout peur d'en faire beaucoup trop, grâce à cette générosité et aux performances du casting, Rebel Moon Partie 1 : Enfant du feu se regarde très facilement. Blockbuster à la fois accessible et ambitieux, sérieux comme tout en second degré, le film semble en effet constamment traversé par un plaisir authentique de se faire, de se développer, et tant pis si tout n'est pas parfait.
La deuxième partie de cette grande histoire, Rebel Moon Partie 2 : L'Entailleuse, a déjà sa date de diffusion, fixée au 19 avril 2024. Et une version longue de Rebel Moon Partie 1 : Enfant du feu est aussi annoncée, avec un classement R-Rated et des séquences inédites. Tout va très vite, un peu n'importe comment, mais avec ce premier film ultra-généreux et déterminé à s'amuser, Zack Snyder a gagné assez de crédit pour qu'on attende la suite avec une sincère curiosité.