En pleine affaire Weinstein, et alors que Roman Polanski fait face à de nouvelles accusations de viol, la rétrospective qui doit lui être consacrée à la Cinémathèque française est vivement contestée.
L'hommage consacré à l'œuvre cinématographique du réalisateur franco-polonais Roman Polanski aura bel et bien lieu. L'institution parisienne l'a confirmé dans un communiqué diffusé mercredi 25 octobre. En signe de protestation, l'association Osez le féminisme appelle à un rassemblement devant la Cinémathèque française.
Dans la tourmente Weinstein
L’initiative était prévue de longue date, afin de coller à la sortie du nouveau film du réalisateur, D'après une histoire vraie. Mais l'affaire Weinstein, qui a poussé des centaines de femmes victimes d’abus sexuels à rompre le silence, a réveillé les polémiques autour de Roman Polanski.
En effet, le réalisateur franco-polonais est lui aussi accusé d’agressions sexuelles contre des femmes. Cela dure depuis des années, sans que cela n'entrave véritablement sa carrière. Il a seulement été incarcéré deux fois, pour une durée de moins de quatre mois au total.
Roman Polanski avait reconnu en 1977 être coupable d'attouchements sexuels sur une mineure de 13 ans, Samantha Geimer lors d'un shooting photo organisé dans la demeure de son ami Jack Nicholson. La victime avait demandé l’arrêt des poursuites mais n’avait pas dénié les faits. Charlotte Lewis, Renate Langer, et plus récemment Marianne Barnard, ont révélé avoir également subi des agressions sexuelles de la part du réalisateur.
L'artiste californienne Marianne Barnard a porté plainte à Los Angeles. Elle a par ailleurs lancé une pétition pour demander l'exclusion de Polanski de l’académie des oscars. Elle a déclaré avoir été «inspirée par la force des femmes» après les révélations sur Harvey Weinstein.
Il y a quelques mois, le choix de Roman Polanski comme président des César avait fait l'objet de controverse, et le réalisateur avait finalement décidé de ne pas participer à la soirée. Mais cette fois-ci, il se rendra bien à la Cinémathèque pour présenter son dernier film, lundi 30 octobre. Puis deux jours plus tard il sera attendu à l’ouverture au public de la rétrospective. Elle doit se tenir jusqu’au 3 décembre. Plusieurs de ses films sont au programme de l'Institution et une master class est également prévue.
De vives contestations
Cet hommage n'est pas du goût de certaines associations féministes. Dans un communiqué publié ce mardi, Osez le féminisme accuse la Cinémathèque française de «participer à la culture de l’impunité des violences masculines» et appelle à un rassemblement lundi 30 octobre devant l’institution.
Comment promouvoir et encourager les femmes à dénoncer leurs agresseurs si en même temps des hommes comme Roman Polanski ou Bertrand Cantat continuent à être mis sur un piédestal, sous prétexte que ce sont des artistes.
De nombreuses associations et militantes ont relayé l’appel sur les réseaux sociaux. Selon l'association féministe Politiqu'elles :
Rendre hommage à Roman Polanski n'est ni plus ni moins qu'un scandale.
La réponse de la Cinémathèque
L'institution assume son choix et dénonce une demande de "censure pure et simple". Dans son communiqué du 25 octobre, elle réaffirme ses valeurs :
Fidèle à ses valeurs et à sa tradition d'indépendance, La Cinémathèque n'entend se substituer à aucune justice. Son rôle de Musée du cinéma ne consiste pas à placer qui que ce soit sur un quelconque piédestal moral. Ceux qui nous reprochent cela ne mettent jamais les pieds dans nos salles et ignorent tout de nos missions de conservation et de transmission.
Au fond, la question de fond qui refait surface est la suivante : peut-on séparer l'oeuvre de l'artiste ? Peut-on blâmer Polanski et aduler son oeuvre? Ces interrogations, aussi vieilles que les aventures du professeur Abronsius chez les vampires, refont surface aujourd'hui. Malheureusement, elles ne trouvent toujours pas de réponse.
Ci-dessous, retrouvez la bande-annonce de D'après une histoire vraie qui sortira le 1er novembre 2017.