Simone, le voyage du siècle : ces scènes difficiles à tourner pour le réalisateur

Simone, le voyage du siècle : ces scènes difficiles à tourner pour le réalisateur

Dans "Simone le voyage du siècle", Olivier Dahan filme l'horreur de la guerre et des camps de concentration. Le réalisateur s'est beaucoup interrogé sur la manière de mettre en scène ces séquences.

Simone, le voyage du siècle : la vie de Simone Veil

Olivier Dahan a connu un succès impressionnant en 2007 avec La Môme, le biopic sur Edith Piaf porté par Marion Cotillard. En 2014, il renouait avec le genre en s'intéressant à Grace Kelly dans Grace de Monaco. Près de dix ans plus tard, c'est cette fois l'une des plus grandes figures de la politique française qui est mise en lumière avec Simone, le voyage du siècle consacré à Simone Veil.

Nommée ministre de la santé en 1974 par Valéry Giscard d'Estaing, Simone Veil, rescapée de la Shoah, a grandement lutté contre la discrimination des femmes et a notamment fait adopter la loi Veil, permettant de dépénaliser l'avortement en France. Pour l'incarner à l'écran, le réalisateur a fait appel à deux comédiennes. D'un côté Rebecca Marder, alors figure montante du cinéma français (voir notre interview Portrait), pour dépeindre la première partie de la vie de Simone Veil. Et de l'autre Elsa Zylberstein qui l'incarne plus âgée grâce à des prothèses.

Rebecca Marder - Simone, le voyage du siècle ©Warner Bros.
Rebecca Marder - Simone, le voyage du siècle ©Warner Bros.

Même si Simone, le voyage du siècle n'a pas eu le même succès que La Môme (plus de 5 millions d'entrées en France), il aura tout de même attiré plus de 2,4 millions de spectateurs dans les salles. Un très beau score auquel s'ajoutent deux récompenses aux César 2023 pour les meilleurs costumes et les meilleurs décors.

Des séquences compliquées pour Olivier Dahan

On suit donc Simone Veil de sa jeunesse dans les années 1930, jusqu'à ses derniers moments, décédant le 30 juin 2017. Olivier Dahan ne pouvait évidemment pas occulter la période de la Seconde Guerre mondiale. Le réalisateur s'est alors interrogé sur la manière dont il allait représenter l'horreur de la guerre et les camps de concentration.

S'il n'est pas le premier à le faire, cela reste toujours délicat. Car si certains estiment que cela fait partie du travail de mémoire de mettre en scène les camps de concentration, pour d'autres, une question morale se pose. De plus, comme il l'expliquait dans le dossier de presse du film, que pouvait-il apporter de plus par rapport à d'autres œuvres ?

Je me suis posé beaucoup de questions quant à la représentation. J’ai coupé des scènes dans le scénario. Qu’est-ce que je pouvais montrer alors que tout a été dit et montré ? Pour autant, je me suis dit que ce n’est pas parce que les camps de la mort ont été vus et montrés que les jeunes générations les ont vus. Il n’est pas évident que les plus jeunes aient vu La Liste de Schindler, Shoah, Le Pianiste, ou même Le Fils de Saul. Je voulais faire un film très accessible et en même temps exigeant. Du coup qu’est-ce que je pouvais m’autoriser à montrer ? J’ai filmé une arrivée dans les camps – la première déshumanisation.

Simone, le voyage du siècle ©Warner Bros.
Simone, le voyage du siècle ©Warner Bros.

Olivier Dahan filme donc ces séquences difficiles à regarder, avec des corps de plus en plus affaiblis et des femmes tondues. Mais le plus dur restait à venir pour le réalisateur avec une séquence "pire que Dachau et Auschwitz" qu'il a souhaité aborder par le biais d'un texte de Simone Veil dont il n'a rien voulu supprimer.

Il y a ensuite cet épisode, très fort, qui suit la libération des camps. Après la marche de la mort, il y a eu tout une séquence, pire que Dachau et Auschwitz, au moment où le Reich s’écroule : une forme d’errance pendant laquelle ont eu lieu des viols, des meurtres etc. Je voulais aborder cet épisode de manière non descriptive. J’ai utilisé un long texte de Simone Veil sur lequel j’ai monté des images de paysages qui défilent en plan-séquence. À mesure que l’on avance dans le plan, on remonte le temps. Le texte est un récit qui raconte comment, après Auschwitz, on peut basculer plus loin encore en enfer. C’est sans doute pour moi la partie la plus importante de l’épisode des camps : le récit verbatim, seul, raconte l’histoire. Je ne voyais même pas comment je pouvais ajouter un mot ou supprimer une phrase.