Un décor apocalyptique, un froid glacial et une arche de ferraille : le Transperceneige. Adapté de la bande-dessinée de Rochette, cette retranscription de la page à l'écran est une réussite à tout point de vue.
Le défi était grand pour le réalisateur qui compte dans sa filmographie des petits films d'"auteurs" présentés à Cannes. De l'intimiste au blockbuster, le Coréen a su faire le grand saut avec aisance et souplesse. Le premier défi était bien sûr de convaincre les auteurs de céder les droits au cinéma, et d'ailleurs toute cette partie en relation avec la planche dessinée fait l'objet d'un documentaire trés élaboré sur le cheminement et la progression des échanges entre Bong Joo-ho et les dessinateurs. Des premières négociations à la projection du film à Séoul, c'est une partie très intéressante de pré-production qui nous est proposée dans les bonus du DVD.
Puis enfin vient la question du train reconstruit wagon par wagon, tous plus réalistes les uns que les autres, et marquant bien les différentes classes sociales au fur et à mesure que les révolutionnaires remontent les rames. Une "lutte des classes" poussée dans les moindres détails du physique aux conditions de vie en passant par l'atmosphère, le réalisateur et ses décorateurs ont fait évoluer le train de l'antichambre de l'enfer au grand luxe avec brio.
Menés par un scénario adapté, tout en rebondissements et en intrigues, les acteurs sont littéralement transformés. Chris Evans tranche avec Captain America : First Avenger, Tilda Swinton avec Michael Clayton, Octavia Spencer avec La Couleur des sentiments et John Hurt avec La Taupe. Tous se confient sur cette expérience extraordinaire lors d'interviews contenus dans le making-of soulignant le travail qu'ils ont dû effectuer en amont. Tous sont métamorphosés pour livrer une performance intense et épuisante dans ce train de l'enfer. Chahutés par des traitres et bien sûr des méchants de premier ordre, les personnages tant que les acteurs sont captivants et captivés par leur survie et la défense de leurs intérêts.
De péripéties en péripéties le spectateur reste en haleine, et s'attache à ces gens "normaux", le scénario et le décor maintiennent une pression permanente, une tension palpable décuplée lorsque Ed Harris entre en scène... Sous pression, l'assistance boit la moindre des répliques des personnages et se laisse bouleverser par la chute aussi fourbe qu'inattendue. Pour un premier essai dans la cour des grands, Bong Joon-ho se pare d'un casting international cinq étoiles et nous transporte dans un tour du monde en enfer. Efficace, oppressant, bien ficelé, formidablement interprété, Snowpiercer s'impose comme une référence du genre apocalyptique.
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Lysiane Tréguier (3 avril 2014)