Amazon fait face à un procès instauré par les successeurs de l'artiste americano-cubaine Ana Mendieta contre le remake de "Suspiria".
Le film d'épouvante-horreur Suspiria, signé Luca Guadagnino (Call Me by Your Name) sortira dans nos salles le 14 novembre. D'après nos confrères de chez Deadline, un procès viendrait malheureusement entacher les retombées positives du Festival de Venise.
Remake du chef d'œuvre du même nom (1977) de Dario Argento, le film tend à rendre hommage au premier sans pour autant le copier - entre autres de par sa longueur (2h32 contre 1h35 il y a 41 ans). Tout ceci est bien joli, mais voilà qu'Amazon est poursuivi pour violation de droit d'auteur par les successeurs d'Ana Mendieta. En effet, le film Suspiria se voit accusé d'avoir librement emprunté le travail de l'artiste americano-cubaine Ana Mendieta.
Une artiste engagée
Née à la Havane en 1948, Ana Mendieta est morte à l'âge de 36 ans en tombant accidentellement par la fenêtre de son appartement à New York. La jeune femme était une performeuse, sculptrice, peintre, photographe et artiste vidéo renommée. Surtout connue pour son travail earth-body, son œuvre se situe à la croisée du land art et du body Art. Explorant la binarité du genre, son travail s'inscrit ainsi dans une vision essentialiste du corps et des rapports entre les sexes.
Mendieta réalisa la plupart de ses interventions, œuvres, performances et films entre 1972 et 1978. En 1972, ses performances Feathers on a Woman et Death of a Chicken mettaient en scène un corps de femme recouvert de plumes blanches ou de sang d'un poulet, fraîchement égorgé entre les mains de la performeuse. Ces actions reflétaient le lien entre le sacrifice animal et le sacrifice des femmes et mettait au centre la question de l'animalité, la virginité et la création. L'artiste réalisa également Facial Variation Cosmetic, collant son visage à une vitre pour montrer sa volonté de la traverser. Le verre symbolisait le mur invisible sur lequel les espérances féminines se heurtent.
Ses performances comptent encore aujourd'hui parmi les plus radicales de ce mouvement artistique. La représentation des abus sexuels et l'utilisation de sang animal imprègnent un grand nombre de ses œuvres. Son œuvre est aujourd'hui gérée par sa sœur Raquelin et sa nièce Rachel, en étroite collaboration avec la Galerie Lelong & Co, à Paris et à New York.
Les accusations
Il semblerait donc que certaines images de Suspiria soient issues du travail de Mendieta, plus particulièrement de sa série Siluetas, réalisée entre 1973 et 1980. Celle-ci mettait en scène des empreintes de son corps, visibles en creux dans la terre et le sable, ou réalisées par assemblage de divers éléments naturels. Ces empreintes sont destinées à être éphémères, la nature pouvant reprendre son droit, et sont parfois asexuées. Cette série est imprégnée d'un double mouvement : celui du marquage du corps dans la nature, grâce aux empreintes laissées, mais aussi l'effacement de ce même corps, par leur caractère temporaire.
Luca Guadagnino a répondu que l'esthétisme choisi pour son film, qui était d'ailleurs l'un des plus gros points abordé lors du Festival de Venise, est effectivement inspiré de plusieurs artistes. Dont Mendieta. Le réalisateur italien a également ajouté que ses influences incluaient "l'art féministe radical des années 70 qui se tournait vers la violence commise au corps féminin". Mendieta se place inévitablement dans cette catégorie avec, entre autres, sa série Autoportraits en sang. Amazon a préféré ne pas commenter l'affaire lorsque Deadline a tenté d'entrer en contact.
La suite nous dira si cette poursuite ira bien jusqu'au procès et si oui ou non il s'agit d'une violation du droit d'auteur. Le film sortira dans les salles le 14 novembre, voici la bande-annonce :