Les deux premiers épisodes de "The Idol" ont été présentés au 76e Festival de Cannes. Le show, qui avait déjà été attaqué, a fait réagir les premiers spectateurs. Voici notre avis.
Un scandale prévisible à Cannes
Avant même la présentation des deux premiers épisodes de The Idol au 76e Festival de Cannes, la série HBO s'était offert un bad buzz après un article de Rolling Stone. Le magazine américain avait fait des révélations dérangeantes sur le tournage, pointant la toxicité présumée de Sam Levinson et Abel Tesfaye (artiste connu sou le nom de The Weeknd).
L'article évoquait le renvoi de la réalisatrice Amy Seimetz après avoir tourné la majorité du show suite à des divergences artistiques, des présumés rajouts de scènes choquantes et le changement de direction pour faire de The Idol "une vision fantasmée du viol". HBO avait fait un démenti en assurant que le tournage s'était déroulé dans de bonnes conditions. Avant que Lily-Rose Depp ne fasse de même en conférence de presse.
Malgré tout, avant même la projection des épisodes, la série avait cette étiquette de "show antiféministe". C'est finalement sans surprise qu'après la diffusion on a vu sur les réseaux sociaux des retours virulents.
Nous avons pu découvrir ces deux premiers épisodes de The Idol. Et si chacun pourra interpréter la série comme il le souhaite, il semble bon de préciser certaines choses sur ce que montre réellement le show. The Idol suit Jocelyn, une chanteuse pop (entre Britney Spears et Miley Cyrus) qui a perdu pied suite au décès de sa mère. Un an après, son retour est imminent avec un nouveau tube et une tournée qui approche.
Clairement la jeune femme n'est pas au mieux et ses managers font tout pour qu'elle tienne le coup. Non pas qu'ils tiennent véritablement à elle. Mais parce qu'il serait bien dommageable que sa tournée soit annulée après avoir dépensé des millions.
Que montre et dit vraiment The Idol ?
La longue première séquence de l'épisode 1 donne le ton avec cet entourage de Jocelyn (managers, assistants, directeurs artistiques ou autres) qui doit dès le début gérer une crise. Une photo de leur star avec du sperme sur le visage a fuité sur Internet. Aucun ne pensera vraiment au ressenti de Jocelyn, mais plutôt à des questions d'image. "Quelle adolescente de 14 ans voudra la voir en concert après cela ?" se dit Chaim l'un des managers (parfaitement interprété par Hank Azaria).
Une autre, Nikki, (également excellente Jane Adams) se montre encore plus horrible, déclarant qu'à son époque un tel acte était la preuve d'un date qui s'est bien passé.
Evidemment, il n'est pas question de soutenir ce monde. Et l'insulte "chaussette à sperme" que reçoit Jocelyn sur Twitter est là pour pointer l'une des innombrables problématiques de ce milieu. Le sexe fait vendre, et même les maladies mentales peuvent être détournées pour être sexy. C'est du moins le point de vue de l'impitoyable Nikki. Mais encore une fois, The Idol dénonce tout cela. Tout le système autour.
Il n'y a qu'à voir le sort réservé à un coordinateur d'intimité lors d'une séance photo où Jocelyn doit être toujours plus sexy tout en proposant des émotions volontairement ridicules. Au moment où elle montre entièrement ses seins, le coordinateur intervient. Non pas parce que la chanteuse pourrait être mal à l'aise. Mais uniquement parce que cela ne fait pas partie du contrat. Et même si Jocelyn souhaite se mettre à nu, chez elle pour poser pour son album, il faudra attendre 48h avant de le faire. La solution hilarante de Chaim sera de l'enfermer dans les toilettes pendant 3 heures.
Le sexy se révèle moche et vulgaire
Plus tard, Jocelyn se retrouve à répéter une chorégraphie pour le tournage de son clip en toute petite tenue. Le fait que Sam Levinson filme Lily-Rose Depp dans des positions lascives a été critiqué. Male gaze ou choix de mise en scène pour contraster toujours plus avec les propos des managers de Jocelyn (et une journaliste de Vanity Fair qui en prend aussi pour son grade), qui l'observent au loin avec un grand sourire, et ainsi faire réagir ?
Reste que ces tenues minuscules que Jocelyn porte constamment témoignent d'une certaine aliénation de la chanteuse, transformée en objet de désir depuis des années. Le personnage de l'assistante est d'ailleurs souvent là pour tenter d'apporter une parole censée.
D'ailleurs, cette séquence est à mettre en parallèle avec le tournage du clip dans l'épisode 2 où le "sexy" disparaît. Jocelyn s'épuise, enchaîne les allers-retours en tenue de scène entre le plateau et la caméra pour voir les rushs et filmer inlassablement la même scène jusqu'à atteindre la perfection. Elle finira les pieds en sang, le visage boursouflé par les larmes et noirci par son mascara qui coule.
Après cette première partie, selon nous très réussie, The Idol fait intervenir Tedros (Abel Tesfaye), le patron d'un club qui va charmer Jocelyn. Un manipulateur qui, au fil des scènes, se révélera un escroc et un homme vulgaire. A l'image de ses dialogues typiques d'un porno avant de passer à l'acte avec Jocelyn.
Bien qu'on puisse regretter un montage parfois trop clipesque de la part de Sam Levinson, et des discussions trop étirées entre les deux personnages, l'intérêt réside dans l'emprise que développe Tedros sur Jocelyn pour potentiellement faire tendre The Idol vers le thriller. L'homme est éminemment toxique et un pervers narcissique. La série ne s'en cache pas. Il faudra attendre de voir où nous mènent les épisodes suivants. Mais ce début a tout de même du potentiel bien qu'on puisse déjà voir poindre certaines limites.
The Idol est à découvrir sur le Pass Warner de Prime Video à partir du 4 juin.