« The Woman King » réalisé par Gina Prince-Bythewood avec Viola Davis s'inspire de l’histoire vraie des Agojie, le tout premier régiment de femmes guerrières de l’Histoire.
C’est quoi The Woman King ?
Après avoir mis en scène Love & Basketball, Le Secret de Lily Owens ou encore le récent The Old Guard sur Netflix, Gina Prince-Bythewood est de retour avec son nouveau film : The Woman King (découvrez ici notre avis sur le film). Porté par Viola Davis, Thuso Mbedu, Lashana Lynch ou encore John Boyega, le long-métrage raconte, très librement, l’histoire vraie des Agojie. Il s’agit du tout premier groupe de femmes guerrières de l’Histoire, qui ont servi le royaume du Dahomey, l’actuel Bénin, jusqu’à la fin du XIXème siècle. Ces femmes guerrières ont également fortement inspiré les Dora Milaje de Black Panther.
La création des Agojie
Aussi appelées les Mino ou les Amazones du Dahomey, les Agojie sont un ancien régiment militaire entièrement composé de femmes. À leur époque, le Dahomey, qui a prospéré du début du XVIIème siècle jusqu’en 1823, était l’un des royaumes les plus riches au monde. Par sa culture, qui mettait les femmes en avant (toujours dans une certaine mesure, évidemment) ce pays était l’un des plus progressistes de l’Afrique. Chaque femme avait un statut au sein de la hiérarchie militaire de la nation. À tel point que le Roi pouvait donner à une femme le titre de Kpojito, qui se traduit par Femme roi. Officiellement, c’était l’occasion pour cette dernière de gouverner à part égale avec le roi.
Aho Houegbadja, le troisième roi du Dahomey, qui a gouverné de 1645 à 1685, est le premier à avoir utilisé les femmes à la chasse et à la guerre. Il ira même jusqu’à prendre des femmes comme garde rapprochée. Mais c’est la reine Tasi Hangbè, qui régna de 1708 à 1711, qui est la véritable créatrice du corps des Mino du Dahomey.
L'expansion des Agojie
Mais il faut attendre le XIXème siècle pour que les Agojie gagnent en importance, sous l’influence du roi Ghézo (qui gouverne de 1818 à 1858). Sous son règne, le Dahomey se militarise beaucoup plus, ce qui favorise l’expansion des Agojie. Le souverain investit une fortune pour entraîner et armer ses guerrières. Elles deviennent une menace célèbre et redoutée dans tout le pays, voire le continent. À cette époque, 4 000 à 6 000 femmes protègent le Dahomey, ce qui représente un tiers de l’armée du pays.
Les Agojie s’écroulent à la fin du XIXème siècle quand les Européens envahissent l’Afrique de l’Ouest. Le 17 novembre 1894, pendant la seconde guerre franco-dahoméenne, malgré la résistance du roi Behanzin et de son armée, le Dahomey tombe sous protectorat français. La Légion étrangère, disposant de meilleures armes et d’un nombre plus important de soldats, inflige aux Dahoméens des pertes dix fois supérieures aux leurs. Cependant, les Légionnaires soulignèrent plus tard leur incroyable courage et audace.
Nanisca et Nawi ont-elles réellement existé ?
Le récit de The Woman King raconte le destin de Nanisca, la cheffe des Agojie, incarnée par Viola Davis. Si son récit pourrait s’inspirer d’une jeune guerrière portant elle aussi le nom de Nanisca, son aventure est largement romancée. En effet, aucune Nanisca n’est devenue commandante des Agojie, encore moins Femme Roi. Pourtant, d’après Nouvelle FR, en 1889,un officier de la Marine française du nom de Jean Bayol aurait été témoin de la brutalité d’une jeune guerrière qui portait le nom de Nanisca. Cette dernière aurait décapité devant lui l’un de ses adversaires sans sourciller.
Nawi, la jeune recrue incarnée par Thuso Mbedu, serait quant à elle inspirée de la toute dernière guerrière Agojie recensée. Même si celle-ci n’était sans doute pas encore née sous le règne de Ghezo (contrairement à ce que raconte The Woman King), elle serait néanmoins l’ultime survivante connue des Agojie. En 1978, lors d’un reportage dans le village de Kinta, un historien croisa la route de Nawi. Cette dernière disait avoir combattu les Français en 1892, pendant la deuxième guerre franco-dahoméenne. Nawi est décédée en novembre 1979. Elle avait plus de 100 ans.
Focus sur le roi Ghézo
Enfin, le roi Ghézo, interprété par John Boyega, est lui aussi inspiré d’un personnage réel. Il s’agit d’un véritable personnage historique qui a régné sur le Dahomey de 1818 à 1858. Ghézo est célèbre pour avoir totalement réorganisé sa nation. Il a rétabli la paix civile, et a constitué une armée sans précédent. Il a également mis en avant son célèbre corps d’Amazones. Enfin, il a libéré le Dahomey du joug de l’Etat d’Oyo, comme raconté dans The Woman King.
Cependant, même si Ghezo s’est réellement tourné, pendant un temps, vers le commerce d’huile de palme comme substitut de la traite des esclaves, il n’a pas cimenté cette évolution. En effet, Ghézo a préféré retourner vers l’esclavage, beaucoup plus lucratif que n’importe quel autre commerce de l’époque. De 1720 à 1852, le National Géographique estime que le Dahomey a vendu des centaines de milliers d’esclaves aux Britanniques, aux Français et aux Portugais.
The Woman King, bien que romancé, est en tout cas un excellent moyen de découvrir l’histoire des Agojie. Le film est disponible dans les cinémas français dès le 28 septembre 2022.