À côté des monumentales scènes d'action aérienne, des retrouvailles éminemment touchantes entre "Maverick" et "Iceman", le génie de "Top Gun : Maverick" réside dans la mise en scène magistrale de la scène au "Hard Deck", qui donne déjà la résolution d'un des enjeux principaux du film
Top Gun : Maverick, vers l'infini et au-delà
À l'heure où ces lignes sont écrites, Top Gun : Maverick, plus grand succès de l'année 2022, continue de tracer sa route triomphale. Au box-office mondial, il accumule maintenant 1, 403 milliard de dollars de recettes, ce qui le place à la 12e position des plus grands succès de tous les temps, devant Avengers : L'Ère d'Ultron et derrière La Reine des neiges 2. Sur le seul sol américain, il occupe la 6e place avec 683,5 millions de dollars engrangés, avec Black Panther en ligne de mire (700,5 millions).
Le public se presse donc dans les salles obscures, et les critiques de presse se montrent élogieuses. Sur Rotten Tomatoes, le Tomatometer grimpe à 96% et la note du public à 99%. Aux États-Unis comme à l'international, c'est donc un vrai raz-de-marée financier et critique pour la suite du Top Gun de 1986.
Un film aux mille qualités et une séquence centrale
Avec ses séquences aériennes époustouflantes, réalisées avec un maximum d'effets pratiques, ses clins d'oeil nostalgiques au Top Gun de Tony Scott, avec encore le développement de la relation entre Pete "Maverick" Mitchell (Tom Cruise) et Bradley "Rooster" Bradshaw (Miles Teller), avec aussi le formidable retour de Val Kilmer dans son personnage d'"Iceman", Top Gun : Maverick réussit tout ce qu'il entreprend.
Chacun aura sa scène préférée, que celle-ci soit une séquence d'action ou une séquence plus intime. Mais au-delà des goûts et des couleurs, une des premières séquences du film, loin d'être la plus spectaculaire, constitue l'exposé parfait de tous les enjeux de Top Gun : Maverick, et donne déjà la réponse à l'une des questions les plus importantes du film. Cette scène est celle où "Maverick" se rend au "Hard Deck", l'iconique bar de la base Top Gun, dont Penny Benjamin (Jennifer Connelly) est devenue la gérante dans Top Gun : Maverick.
Une scène d'exposition magistrale
Il y a plusieurs éléments dans cette séquence. Tout d'abord, c'est le retour de "Maverick" en quasi anonyme à Top Gun. Mis à part Penny, personne ne sait dans le bar qui il est. Ainsi, lorsque les jeunes pilotes arrivent et finissent par le jeter dehors, ils ignorent que c'est leur futur instructeur. Une séquence-miroir de celle du premier film, durant laquelle "Maverick" drague lourdement "Charlie" (Kelly McGillis), sans savoir qu'elle est son instructrice.
On comprend par ailleurs dans cette séquence que Penny et "Maverick" ont eu une histoire par le passé. Dans Top Gun, elle est seulement citée deux fois, une fois par le commandant Tom "Stinger" Jordan (James Tolkan) et une fois par Carole Bradshaw (Meg Ryan).
En outre, cette scène est l'opportunité pour "Rooster" de s'installer au piano et de jouer "Great Balls of Fire", comme son père "Goose" le fait dans Top Gun. Ce moment musical incorpore des images du premier film, soulignant avec nostalgie les souvenirs et l'émotion de "Maverick".
Celui-ci observe donc le fils de son co-équipier décédé rejouer "leur" chanson, et le fait depuis l'extérieur du bar dont il vient de se faire jeter. Son objectif : gagner sa place parmi ses pilotes, celle de leur leader, et se rapprocher de "Rooster".
(La vidéo ci-dessus est le "clip" officiel du morceau, pas la version montée dans le film.)
L'équipe de la mission finale déjà formée
Mais le véritable enseignement de cette séquence de Top gun : Maverick, qu'on ne peut pas saisir lors d'un seul et unique visionnage, est que l'équipe que doit former "Maverick" est déjà parfaitement constituée dans cette séquence. En effet, après avoir présenté "Maverick" au public via son échange avec Penny, c'est au tour des jeunes pilotes d'être présentés. On rencontre donc "Hangman", "Rooster", "Coyote", "Phoenix", "Fanboy", "Bob" et "Payback".
Comme remarqué par The Hollywood Reporter, la mise en scène de Joseph Kosinski montre déjà quels seront les pilotes qui seront choisis par "Maverick" pour la très dangereuse mission de bombardement, l'objectif pour lequel ils ont été convoqués sur la base Top Gun. En effet, on comprend d'emblée qu'il y a déjà des "clans". "Phoenix" (Monica Barbaro), "Payback" (Jay Ellis), "Fanboy" (Danny Ramirez) et "Bob" (Lewis Pullman) d'un côté, "Hangman" (Glen Powell) et "Coyote" (Greg Tarzan Davis) de l'autre. Ils se taquinent gentiment et s'envoient des vannes, jusqu'à ce que "Rooster" arrive. Celui-ci, à l'instar de "Maverick", semble plus solitaire. Lorsqu'il arrive, il échange quelques piques avec "Hangman" mais s'installe vite au piano pour jouer "Great Balls of Fire".
Lorsque "Rooster" se lance dans ce morceau endiablé, il est uniquement entouré par "Phoenix", "Bob", "Payback" et "Fanboy" - le futur équipage choisi par "Maverick". On ne voit pas du tout, lors de cette mise en scène, ni "Hangman" ni "Coyote", qui sont les deux derniers recalés de l'équipe qui bombardera le site ennemi. Enseignement fondamental : "Rooster" est déjà un meilleur leader et team player que "Hangman".
Maverick observe et fait déjà son choix
Assistant à ce moment musical, "Maverick" est ému et perçoit déjà que "Rooster" a beaucoup de ce qu'il faut pour être choisi. Le réalisateur Joseph Kosinski va dans ce sens :
"Hangman" doit encore grandir, il doit mûrir en tant que pilote. Et il y parvient à la fin du film, ayant fait ce chemin et appris sa leçon. Je pense donc que cette scène montre déjà que "Maverick" a choisi la bonne personne pour la mission finale et, d'une certaine manière, que Rooster a hérité beaucoup de ses qualités de son père. Et c'est ce que Maverick voit en lui.
Une scène d'exposition fournissant donc un maximum des enjeux de Top Gun : Maverick, magistralement mise en scène, et où tous les personnages se placent sur l'échiquier du film. À partir de là, sur cette base très solide, le film peut efficacement développer son intrigue et les relations de ses personnages. Pour le résultat extrêmement réussi qu'on connaît !