Toy Story 3 a dix ans : pourquoi est-il le chef-d'oeuvre de la saga ?

Toy Story 3 a dix ans : pourquoi est-il le chef-d'oeuvre de la saga ?

Sorti en 2010, Toy Story 3 de Lee Unkrich fête cette année ses 10 ans, l’occasion donc de revenir sur ce très grand film qui semblait - aux premiers abords - clôturer la saga de la plus belle des façons.

Toy Story 3 : dix ans déjà

Pour Toy Story 3 sorti en juillet 2010 dans les salles françaises, Pixar prend le risque de sortir de cette chambre au papier peint iconique pour s’aventurer dans les contrées lointaines de la garderie Sunny Side. En effet, Andy rentre à l’université et n’a plus réellement l’âge de jouer avec Woody ou encore Buzz. Ils vont donc tous être donnés (sauf Woody qu’Andy préfère garder avec lui) dans une garderie et vont vivre sous la terreur et la dictature de Lotso, un ours en peluche rose qui sent bon la fraise.

Un film intergénérationnel qui s'inscrit dans le temps

Cette saga a eu pour effet de rassembler les différentes générations qui peuvent toutes se retrouver et s'identifier à des personnages. Toy Story 3 se sert des éléments qui ont plu dans les deux précédents films de la saga tout en s’affranchissant de certains de leurs codes. Sans ré-évoquer le décor, on y découvre par exemple un nouvel enfant vraiment très attachant du nom de Bonnie. Cette jeune fille est assez représentative de cette nouvelle génération : curieuse, très inventive, vraiment attachée à ses jouets. Elle rassemble les symboles qui faisaient qu’Andy était Andy, tout en ayant cette dose de réalisme moderne.

La force de ce troisième opus sur les aventures de Woody, Buzz et de tous leurs amis est qu’il est sorti près de 10 ans après Toy Story 2 dans nos salles françaises. La jeune génération qui a découvert Andy et ses jouets à la fin des années 90 a donc évolué et grandi jusqu’à Toy Story 3 presque autant qu’Andy. En effet, à la différence du temps entre le premier et le deuxième film, le temps qui espace le deuxième et le troisième film est à peu près similaire au bond dans le temps dont on bénéficie dans la diégèse (espace-temps dans lequel se déroule l'histoire proposée par la fiction d'un récit, d'un film, ndlr). Faire grandir son personnage en même temps que son spectateur est ainsi un pari risqué puisqu’il s’étale sur plusieurs années.

Toy Story

La génération qui jouait donc à la manière d’Andy lorsque que Toy Story est sorti avait, à la sortie de Toy Story 3, à peu près l’âge d’entrer à l’université, comme c’est le cas pour le personnage. Pixar a alors choisi pour cette franchise de privilégier le côté réaliste de la temporalité pour que le jeune spectateur de 1996 puisse s’identifier tout au long de son enfance à Andy. La saga Toy Story est la seule qui procède de cette façon. En prenant les exemples de Les Indestructibles ou encore de Le Monde de Nemo, leur suite respective se passe directement après la fin du premier volet bien que celles-ci soient sorties respectivement 15 ans et 13 ans après le premier film. La fin heureuse nous laissait penser que la famille de jouets resterait ensemble pour la vie, peu importe avec quel enfant ils iraient...

Seulement, l’arrivée de Toy Story 4 en 26 juin 2019 est venue remettre en cause cette fin heureuse. Les films Pixar ont beau être des films d’animation, ils n’en restent pas moins réalistes de par leurs procédés graphiques et stylistiques mais également par l’introduction des histoires dans notre monde. Fréquemment, des films d’animation se déroulent dans des univers que l’on pourrait qualifier de « différents », sans réellement avoir de lien avec notre monde. Évidemment, cela crée une distance mais une distance assumée comme une volonté de s’évader vers des contrées lointaines, loin des problèmes du quotidien. D’autres productions animées optent pour un pari plus risqué avec des thématiques fortes, ancrées dans notre réalité, sans forcément se soucier des détails d’évasion.

Pixar et sa recherche de réalisme

Pixar est le parfait équilibre entre ses deux façons de faire avec une vision portée sur le divertissement, sur le monde de la rêverie où chacun est libre d’y trouver son compte pour avoir la chance de voyager à travers différents univers. Seulement, cette représentation est également en corrélation avec cette part de réalisme, recherchée dans certains films d’animation. Cette hétérogénéité de style montre à quel point le studio a pour envie de toucher un public plus large. Cette volonté vise à la fois les spectateurs qui veulent juste prendre un certain plaisir à regarder ces films sans vraiment ce soucier du quotidien, mais également ceux qui veulent comprendre ou reconnaître des choses de notre société.

Dans ce cas présent, là où le réalisme est poussé à son paroxysme, c’est que les enfants qui regardent le film se posent eux-mêmes la question de savoir si les jouets de leur chambre sont aussi vivants lorsqu’ils ne sont pas là. Cette question pose aussi d’autres problématiques chez l’enfant : est-ce que ces « jouets » font tout ce qu’il faut pour qu’il puisse passer une bonne journée, comme c'est la mission de Woody, Buzz et toute l’équipe ? Ou, au contraire, est-ce que les jouets ont un but machiavélique ?

Toutes les interprétations infantiles sont bonnes à analyser. Cependant, au-delà d’être un banal divertissement pour enfants, il développe chez ces derniers une imagination débordante prenant part à ce réalisme dans le film d’animation, dans le sens où le jeune spectateur qui a eu la chance d’avoir des jouets va s’imaginer assez rapidement que c’est aussi son cas. L’enfant va alors fantasmer ces jouets au point de penser qu’ils sont comme ceux d’Andy. Ce côté magique des jouets qui parlent anime non plus les dessins, mais l’imaginaire des enfants et de ceux qui regardent, à des degrés différents.

Pour conclure, Toy Story 3, sans doute plus que ses prédécesseurs et celui qui le suit, est l’archétype même de ce que Pixar fait de mieux. En effet, d'une part Toy Story 3 s'adresse à toutes les générations, mais tout particulièrement aux spectateurs qui ont vu les deux premiers films enfants, et ont donc grandi à peu près en même temps qu'Andy. Et d'autre part, ce film synthétise à la perfection l'expertise des studios Pixar, qui est de savoir nous plonger dans une histoire bourrée d’imagination et mise en scène magistralement, tout en gardant cette dose de réalisme, qui nous permet de procéder à une identification puissante et bâtir des ponts avec le monde réel.