À mon seul désir : comment les actrices ont tourné les scènes de nudité

À mon seul désir : comment les actrices ont tourné les scènes de nudité

"À mon seul désir" est une œuvre sensuelle qui se déroule dans un club de strip-tease loin des clichés et qui prône la liberté des femmes. Grâce au scénario et aux conditions de tournage, la nudité n'a jamais été un problème pour les actrices Louise Chevillotte et Zita Hanrot qui nous racontent le tournage du film de Lucie Borleteau.

À mon seul désir : la beauté des femmes dans un club de strip-tease

Dès son premier long-métrage, Fidelio, l’odyssée d’Alice (2014), on sentait chez Lucie Borleteau un goût pour les univers insolites et un regard beau posé sur les femmes et leur corps. Ainsi, après avoir filmé Ariane Labed sur un vieux cargo marchand, elle s'intéresse dans À mon seul désir (son troisième long-métrage) à l'univers du strip-tease. Mais dans son film, sensuel et sensoriel, la réalisatrice s'éloigne des clichés et des a priori pour dévoiler un monde fascinant où les femmes dominent.

L'histoire suit Aurore (Louise Chevillotte), qui décide un jour de franchir le pas en entrant dans un club de strip-tease. Elle demande alors à y travailler sans avoir aucune expérience. Pour se faire une meilleure idée de ce qui l'attend, elle découvre d'abord le théâtre érotique du sous-sol où notamment Mia (Zita Hanrot) s'éclate en jouant des personnages décalés tout en se déshabillant devant un public charmé.

Louise Chevillotte et Zita Hanrot en héroïnes à égalité

Comme dit précédemment, le cinéma de Lucie Borleteau met en avant des femmes. Des femmes libres et en pleine consciences. Une approche qui a son importance dans À mon seul désir, comme l'analysait avec nous Zita Hanrot. Pour elle, dans le film, "ces filles sont là en pleine conscience. Elles choisissent, et pas l'inverse. Et ça change tout". À cela s'ajoute la question du regard. Pas celui des hommes, mais bien de ces femmes, nous précisait à son tour Louise Chevillotte :

C'est un film où on regarde. Et on nous filme en train de regarder, avec la caméra souvent dans notre dos. Parce qu'on est vraiment dans l'esprit de ces filles.

Louise Chevillotte - À mon seul désir ©Pyramide Films
Louise Chevillotte - À mon seul désir ©Pyramide Films

De là, Lucie Borleteau tire une histoire d'amour entre deux personnages complexes, différents, mais toujours traités sur un pied d'égalité. D'un côté Aurore, une "anarchiste hors de la morale, qui n'est pas dans les codes habituels de l'amour, du succès, de la crainte féminie mais qui est curieuse et sans a priori". Et de l'autre côté Mia, confiante et qui a en dehors une vie pleine, mais qui devient en même temps fascinée par la liberté d'Aurore. Une relation qu'on voit finalement rarement de cette manière au cinéma d'après Louise Chevillotte :

Elles se permettent l'une et l'autre d'exister pleinement. J'ai l'impression que, d'habitude au cinéma, il y a dans les histoires d'amour un mystère que l'un exerce sur l'autre, une initiation. Là, il y a une égalité. Et je pense qu'à ce niveau ce n'est pas anodin que ce soit deux femmes. Car on est en dehors des schémas patriarcaux.

Apprendre à "stripper" pour les comédiennes

Cette approche scénaristique a alors eu son importance dans la confiance des actrices pour des scènes de nudités jamais évidentes à tourner. Pour s'y préparer, les deux actrices principales et leurs collègues ont eu la possibilité de se retrouver pour une "résidence de stripe-tease". Trois jours durant lesquels les comédiennes se sont d'abord mises à nu face au autres, avant d'apprendre des méthodes précises pour se déshabiller, comme nous le confiait Zita Hanrot :

C'est super intéressant, pour trouver nos rapports à chacune. Par exemple, Mia fait ça depuis longtemps donc elle doit bien connaître les autres filles. C'était intéressant de se mettre à nu entre nous aussi, sans caméra. C'est là qu'on a appris à "stripper". On a appris à se faire confiance, à comprendre ce qui était en jeu pour chacune. Car ce n'est pas anodin d'être nue. Mais ici c'était pris avec beaucoup de délicatesse, les unes avec les autres. C'était plein de respect dans la façon de travailler.

À mon seul désir ©Pyramide Films
À mon seul désir ©Pyramide Films

Avant que ne poursuive à ce sujet Louise Chevillotte :

On a fait des strip-teases d'abord très maladroitement. Donc on nous a appris à retirer un pantalon ou un soutien-gorge, ce qui peut avoir l'air très simple en apparence. Mais au-delà de cette action de se dénuder pour revendiquer sa sexualité, c'est aussi intéressant de voir ce que ça provoque de le faire et de le recevoir. Et j'ai été très surprise de l'émotion que ça m'a procurée.

"La nudité n'a jamais été un problème"

En plus de cet apprentissage, les actrices se sont rendues dans le théâtre érotique dont s'est inspirée Lucie Borleteau (et sa co-scénariste Clara Bourreau) pour À mon seul désir. Un lieu qui les a surprises, voyant les filles comme "les décideuses" nous expliquait Louise Chevillotte :

C'est comme avec la sexualité. Quand les codes sont clairs et que tout le monde est d'accord, on peut aller loin. J'ai découvert un club de strip-tease avec des filles totalement libres et protégées. C'est elles qui décident. Elles peuvent lever le petit doigt si elles veulent qu'un spectateur parte.

Lucie Borleteau présente ainsi avec À mon seul désir une nudité ludique et joyeuse où les femmes du club s'amusent, prennent du plaisir et dirigent sur la scène du théâtre érotique. Il restait néanmoins à mettre, sur le tournage, les actrices dans les meilleures conditions. Pour cela, la réalisatrice a notamment pu compter sur de nombreuses femmes en tant que cheffes de poste sur le plateau, et s'est assurée qu'avec les hommes présents tout était au clair, précisait Louise Chevillotte :

C'était une zone extrêmement sécurisée. Par exemple un jour, une d'entre nous n'a pas senti un des figurants. Le regard n'était pas au clair. Et il a été remercié immédiatement. Donc même si la nudité a été une question, cela n'a jamais été un problème.

Zita Hanrot - À mon seul désir ©Pyramide Films
Zita Hanrot - À mon seul désir ©Pyramide Films

Zita Hanrot a tout de même eu un droit de regard sur une scène précise. Une séquence dans une clairière où elle apparaît entièrement nue, immobile et de plein pied, sans aucun artifice. La comédienne a alors pu voir la scène au montage pour la valider et a été surprise d'avoir l'impression de se voir nue pour la première fois dans le film.

Je trouvais que, jusqu'à cette séquence, mon personnage était finalement assez habillé. Là, il y a cette lumière qui ne déguise plus, contrairement à ce qu'on peut voir dans le cabaret. Donc c'est la seule scène où je me suis dit que j'étais nue. Bien sûr il y a aussi de la nudité dans les autres séquences. Mais ça ne m'a pas frappé de la même façon. Peut-être aussi parce que le personnage de Mia joue beaucoup dans la vie, dans ses rapports. À cet instant, les choses sont différentes.

À mon seul désir est à découvrir dans les salles le 5 avril 2023.