À 30 ans, l'acteur mexicain Diego Calva forme avec Brad Pitt et Margot Robbie l'émouvant trio de "Babylon". Il nous a raconté son casting, son travail avec le réalisateur et ses prestigieux partenaires. Sans oublier son souvenir halluciné de la monumentale séquence d'introduction...
Rencontre avec Diego Calva
Dans Babylon de Damien Chazelle, Diego Calva incarne Manny Torres, jeune homme travailleur et bien décidé à faire son bout de chemin dans le cinéma hollywoodien des années 20. L'arrivée au même moment du cinéma parlant, des "talkies", va ringardiser les stars du cinéma muet et bouleverser Hollywood, mais ce sera une chance pour lui, qui va devenir un temps cadre exécutif d'un prestigieux studio... Rencontre avec un acteur en plein rêve hollywoodien.
Vous étiez un acteur quasi inconnu avant Babylon, comment s'est passé votre casting et le travail avec Damien Chazelle ?
Diego Calva : Ça a débuté comme un casting normal, j'ai reçu des extraits, des scènes, mais j'ignorais que c'était le nouveau film de Damien Chazelle, avec ces stars. J'ai donc envoyé des enregistrements, des petites vidéos. Puis j'ai fait une lecture collective par Zoom, avec Emma Stone notamment, et j'ai commencé à échanger avec Damien. J'ai reçu le script. Et puis il y a eu le Covid. Je n'ai eu strictement aucune nouvelle pendant trois mois. Je me suis alors dit, "ils ont choisi quelqu'un d'autre", "ce n'est pas pour moi"...
D. C. : Mais j'étais confiné dans mon appartement, et j'avais ce magnifique script, alors je le lisais, le relisais. Le personnage était fascinant, ça m'amusait. Puis Damien m'a rappelé, pour me dire que le casting et la production reprenaient, alors je lui ai envoyé de nouvelles vidéos. Pas trois ou quatre, plutôt quarante ou cinquante !
Je crois que cette expérience avec Damien a été la plus belle de ma vie. On a beaucoup travaillé ensemble, en équipe, il m'a guidé. Il a toujours été à mes côtés, c'est un réalisateur qui apporte beaucoup de soutien. Avec lui je crois que j'ai eu un déclic, j'ai découvert un nouveau niveau de jeu. Parce qu'il est très précis et minutieux. On a travaillé sur mes regards, sur mes lèvres, j'ai littéralement appris l'anglais pour ce rôle ! Et en même temps Damien est très joueur, libre et prêt à essayer des choses. Plus d'une fois il m'a proposé d'essayer des séquences autrement, de me laisser faire ma propre version. Donc il est à la fois très précis, et très flexible.
Vous formez un trio avec Margot Robbie et Brad Pitt, deux grandes références hollywoodiennes. Comment était-ce ?
D. C. : Avec Margot, j'ai eu la meilleure expérience de jeu imaginable. Je n'avais jamais travaillé avec quelqu'un si discipliné, si investi, et aussi si dingue ! Margot est littéralement la plus grande actrice que je connaisse. Et je lui serai toujours reconnaissant parce que mes scènes avec elle sont les meilleures scènes que j'ai pu jouer dans ma carrière. Mes scènes avec Margot, c'est mon sommet ! (rires)
D. C. : Avec Brad, j'essayais de lui "voler" des choses, d'apprendre de lui. Il est comme un receveur au baseball, très sage et en contrôle de son art. Ce qui m'a permis de me sentir libre de lui demander des conseils pour des scènes et, aussi, plus largement, lui poser des questions sur sa carrière, sur ses choix de rôles. J'ai beaucoup appris à ses côtés.
Babylon s'ouvre sur une fête monumentale. Quel souvenir en gardez-vous ?
D. C. : Pour la séquence de la fête, je m'en souviens comme d'un épisode de La Quatrième dimension, avec la sensation d'avoir passé deux semaines dans la même soirée ! C'était comme vivre dans une boucle. Mais c'était très dur de réussir à s'immerger et exister dans cette séquence, parce que tout ce qu'on y voit, à l'exception de l'éléphant, est réel !
Il y avait 400 figurants, les décorateurs, une poule, des danseurs, des cascadeurs, il y avait même des acteurs porno ! C'était complètement fou. Et je pense que Damien a aimé accomplir ça, montrer cette folie, ce moment renversant. C'était tellement cool.
Damien Chazelle aime jouer avec la dimension méta de ses histoires. Est-ce que Manny vous ressemble ?
D. C. : Je ressemble à Manny, dans ces jeunes années. À ce moment, dans ma vie, on est à peu près à la moitié de Babylon, quand Manny commence juste à réussir. J'espère que j'ai appris de ce personnage, parce qu'à la fin, il paye. Et il paye cher le coût du succès, le coût de son amour. On verra, je ne sais pas si je dois déjà payer quelque chose maintenant (rires). Mais on pourra avoir une nouvelle conversation dans dix ans et on verra ce qui est arrivé !
C'est votre personnage qui porte la conclusion du film, avec une mise en abîme et un montage d'images qui n'ont laissé personne indifférent. Quel est votre sentiment sur l'histoire que raconte Babylon ?
D. C. : Damien m'a dit pour cette séquence,"Diego, il faut que les spectateurs revoient tout le film dans tes yeux." C'était extrêmement dur à jouer. Mais la clé était que Manny n'est pas vraiment triste, et il a ce très léger sourire. Je le perçois plutôt comme une boucle qui se referme. Les films imitent la vie, puis la vie imite les films, et maintenant c'est Manuel qui voit sa vie sur le grand écran, d'une certaine manière.
Je crois qu'avec ces images Damien déclare profondément son amour pour les films. Quand il montre Terminator, Jurassic Park, tous les autres films, c'est une manière de montrer que chaque fois que le cinéma meurt, il renaît. Et que ce schéma se répète indéfiniment. Quand les CGI sont arrivées, c'est comme quand le cinéma parlant a fait suite au muet. J'aime beaucoup cette sensation douce-amère, et l'histoire de Babylon est celle de la vie, horrible et magnifique en même temps.