Cinq ans après le film "Braqueurs", Julien Leclercq et Sami Bouajila sont de retour pour la série du même nom, disponible sur Netflix. Le réalisateur s'est associé à Hamdi Hlioua, créateur notamment de la série "Cannabis", en vue d'élargir cet univers et de proposer un spectacle encore plus ambitieux. Focus sur la série et rencontre avec ses créateurs.
La saison des braquages est ouverte !
À partir du 24 septembre 2021, les abonnés Netflix peuventt découvrir la série Braqueurs, inspirée du film du même nom sorti en 2016. Évidemment cela ne doit rien au hasard puisque c'est Julien Leclercq, réalisateur du film, qui dérive ici son histoire avec Hamid Hlioua dans un format sériel, 6 épisodes d'environ 45mn. Des armes lourdes, des gangsters taciturnes et honorables, des jeunes qui veulent s'en sortir et des familles du grand banditisme, tout est réuni pour qu'un grand coup soit frappé. À la manière de Zero Zero Zero, voire même de Gangs of London, Braqueurs voit très grand en proposant plusieurs points de vue et une intrigue aux multiples ramifications.
De la grande action et de la tragédie familiale
C'est en visio, et dans une bonne humeur mêlée à l'excitation de l'imminence de la diffusion, qu'on a pu échanger avec Julien Leclercq et Hamdi Hlioua sur cette série d'action à l'ambition inédite. L'ambition, c'est le maître-mot de la démarche, l'idée de développer le plus possible ce qui a été posé dans le film de 2016. Ni une ni deux, le terme de BCU (Braqueurs Cinematic Universe) s'impose de lui-même pendant l'échange ! Loin d'établir une forme de hiérarchie entre le cinéma et la série, les deux auteurs insistent sur l'approfondissement des personnages permis par le format des séries, l'inclusion de plusieurs intrigues, de plusieurs lieux, en somme un développement a priori sans limites pour un créateur.
Hamid Hlioua : J'adorais le travail de Julien Leclercq en tant que metteur en scène au cinéma, et j'avais un super souvenir du film Braqueurs. Alors quand on m'a proposé de le rejoindre et d'imaginer un nouveau chapitre du BCU (rires), c'était très excitant de repartir de ce genre de thriller d'action et d'y réinventer d'une histoire. On s'est retrouvés avec Julien très vite sur la manière dont on allait le faire. On avait notamment l'envie de faire une tragédie familiale, avec ce tryptique : tension - action - famille.
Julien Leclercq : 80 jours de tournage à ce rythme-là, c'est très intense. Il n'y a pas de deuxième réalisateur, pas de deuxième équipe, ça m'a pris une énergie folle. Il faut accoucher d'un film de quatre heures, avec tous ces personnages. Je m'étais fait une promesse en tant que metteur en scène sur la direction artistique, les cascades, le casting des rôles secondaires... Il fallait que tout soit cohérent, et au niveau de ce que j'aime du côté outre-atlantique.
Un film comme La Terre et le Sang, c'est 35 jours de tournage pour 1h20 de film. La série Braqueurs, c'est 80 jours de tournage pour 4h.
Sami Bouajila, braqueur en chef
La série Braqueurs n'est pas une suite au film, puisque pour ceux qui l'ont vu la destinée du personnage de Sami Bouajila est sans équivoque. Il n'incarne donc pas Yanis Zeri mais Mehdi, braqueur chevronné dont le charisme et la froide détermination imposent le respect, sans qu'il n'ait jamais besoin d'élever la voix. C'est, pour l'acteur césarisé en 2021 pour Un fils, une quatrième collaboration avec Julien Leclercq. Et celui-ci ne tarit pas d'éloges sur Sami Bouajila, qu'il considère comme son "frère de cinéma".
J. L. : C'est mon frère de cinéma, j'ai fait quatre projets avec lui, et il est de plus en plus beau, de plus en plus félin, de plus en plus intelligent. Comme le dit Hamid, c'est mathématique : 1h20, c'est un film court, tout en tension. Une série comme celle-ci tient sur 4h, donc on ne peut pas planter sur le casting, sur le leader cast. Je me suis donc mis une grosse pression, il faut penser à un acteur qui pourra être là sur plusieurs saisons. Il y a comme un verrou, succès ou pas, on ne pourra pas en changer, et heureusement Sami Bouajila en braqueur c'est un casting parfait.
Casquette noire, blouson noir, regard encore plus noir, Sami Bouajila excelle dans ce rôle, et surtout il permet aux autres personnages de se développer. S'il capte la lumière, c'est pour mieux la renvoyer sur ses partenaires de jeu, notamment et au premier chef la jeune Tracy Gotoas, charismatique et entraînante jeune fille qui décide de prendre son destin - et son amour - en main. Autre mention spéciale à Samuel Jouy, dont la présence fait regretter qu'on ne le voit pas plus sur nos écrans.
Bruxelles, une ville libre et au croisement des cultures
L'intrigue de Braqueurs prend place en Belgique, et principalement à Bruxelles. Ses couleurs, ses nuits, ses recoins et ses avenues, la caméra de Julien Leclercq évolue comme un poisson dans l'eau dans ces décors naturels. À plusieurs reprises, on peut apprécier son architecture et ses voies, à l'occasion de courses-poursuites et de fusillades de très haut niveau, dès les premiers épisodes. En plus de cette configuration, la grande ambition narrative colle parfaitement avec le côté international de la Belgique. Et autre point crucial, les autorisations de tournage sont plus faciles à obtenir qu'en France.
H. H. : L'idée était que la série ait le même ADN que le film, mais avec sa propre identité. Dès le début, on voulait monter les curseurs, donc les dealeurs de la série sont des narco-trafiquants, et Anvers est la porte d'entrée de la cocaïne en Europe.
J. L. : On a effectivement tourné là où ça se passe ! En tant que metteur en scène, j'ai l'impression que Paris a été filmé déjà dans tous les sens, et je n'arrive pas à fantasmer des scènes ou des décors d'un truc que j'ai déjà vu mille fois. Alors qu'en Belgique il y a un côté conquête de l'Ouest. Le port d'Anvers est sublime, je trouve pas d'équivalent en France, et Bruxelles m'anime vraiment. C'est un carrefour de langues, un carrefour de gens, et en termes d'architecture j'adore.
Sur le plan de la production, il y a un élément qui change aussi radicalement la donne. Les Belges sont bien plus ouverts pour ce type de productions, parce que "Braqueurs" c'est le pire titre possible pour obtenir une autorisation de tournage. À Paris ils demandent tout de suite si on va tirer dans les rues, et c'est impossible à mettre en place. À Bruxelles, on peut, et il y a plein de décors pour "faire la guerre", je n'aurais pas trouvé d'équivalent en France. C'est ce qu'on aime dans Heat, dans The Town, avoir les moyens de bloquer des rues pendant plusieurs jours.
Une saison 2 en vue ?
On ne dira rien de la fin de cette saison. Mais il semble évident qu'au vu de l'ambition de la série, de son ouverture à une une criminalité internationale, et de sa distribution mondiale sur Netflix sous le nom de Ganglands, Braqueurs ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. Il faut dire que depuis Anvers et Bruxelles, Rotterdam et Amsterdam ne sont pas très loin, territoires de la Moccro Mafia, et pas beaucoup plus loin que le port du Havre, autre plaque tournante de multiples trafics. Si le succès est au rendez-vous, nul doute qu'on devrait bientôt entendre parler de nouveau de ces braqueurs !