Sorti en 2016, "Juste la fin du monde" est le sixième film réalisé par Xavier Dolan. Il sort à un moment où le réalisateur québecois est en pleine ascension après le triomphe de "Mommy" en 2014. Doté d'un casting français 5 étoiles, (Vincent Cassel, Léa Seydoux, Marion Cotillard, Natalie Baye, Gaspard Ulliel) ce drame familial est d'une émotion très palpable.
Une pièce signée Lagarce
A l'origine, Juste la fin du monde est une pièce de théâtre écrite par Jean-Luc Lagarce en 1990. Elle sera alors recommandée à Xavier Dolan par l'intermédiaire de son actrice fétiche Anne Dorval, qui l'avait jouée sur scène en 2001. Cette recommandation fut au départ accueillie avec scepticisme par le réalisateur :
J’avais à l’égard de l’histoire et des personnages un blocage intellectuel qui m’empêchait d’aimer la pièce tant vantée par mon amie. J’étais sans doute trop pris par l’impatience d’un projet ou l’élaboration de ma prochaine coiffure pour ressentir la profondeur de cette première lecture diagonale.
Finalement, c'est après le tournage de Mommy que Dolan va sérieusement s'intéresser à l'ouvrage :
Tôt cet été là, je relus - ou lus, vraiment - Juste la fin du monde. Je sus vers la page 6 qu’il s’agirait de mon prochain film. Mon premier en tant qu’homme...
Une pièce autobiographique
Juste la fin du Monde est une pièce de théâtre qui sonne comme un testament de la part de son auteur. En effet, Lagarce l'a écrit au moment où il se savait atteint du sida. Le retour du personnage de Louis chez sa famille afin de leur apprendre sa mort prochaine fait donc écho à la vie personnelle de Lagarce. D'ailleurs, à l'image de ses autres oeuvres, Juste la fin du monde est en partie autobiographique puisqu'il traite de son homosexualité ainsi que des relations difficiles qu'il entretient avec sa famille. Par conséquent, il n'est pas étonnant que Dolan décide d'adapter la pièce de théâtre car il y voit un parallèle à ses propres oeuvres. Pièce parfois incomprise pour ses dialogues et sa mise en scène, elle fut un véritable défi d'adaptation pour le cinéaste qui tenait à la respecter au maximum :
Je voulais que les mots de Lagarce soient dits tels qu’il les avait écrits. Sans compromis. C’est dans cette langue que repose son patrimoine, et c’est à travers elle que son œuvre a trouvé sa postérité. L’édulcorer aurait été banaliser Lagarce.
Des thématiques inhérentes au cinéma de Dolan
Juste la fin du monde semble donc un petit résumé de la filmographie de Dolan puisqu'on y retrouve ses principales thématiques vues dans ses films précédents :
- Pour commencer, il y a la question de l'homosexualité qui est abordée de la même manière que dans J'ai tué ma mère, Laurence Anyways et Tom à la Ferme. En effet, le réalisateur ne lui donne qu'une portée anecdotique pour étayer le développement de son personnage principal. Toutefois, il n'en fait pas l'événement principal de son film. Ainsi, le protagoniste peut être homosexuel comme hétérosexuel. Fidèle à lui-même, son film ne peut être catégorisé dans le genre du cinéma queer.
- Ensuite, il y a la difficulté du cercle familial pour un jeune homme. Cette thématique est la plus récurrente chez Dolan puisqu'on la retrouve dans quasiment tous ses films, en particulier J'ai tué ma mère, Tom à la Ferme et Mommy. Comme souvent, la mère (interprétée par Nathalie Baye) n'est pas épargnée dans ce film. Elle apparaît comme castratrice, envahissante et peu attentive aux réels problèmes de ses enfants.
- Enfin, Juste la fin du Monde est un questionnement perpétuel sur la difficulté de communication entre les hommes. (avec un petit h). Cette thématique avait déjà été abordée par Dolan dans Tom à la Ferme deux ans plus tôt. En effet, une fois de plus, le réalisateur associe le discours viril d'un mâle avec celui plus sensible d'un autre. Toutefois, ces opposés ont du mal à se comprendre et à s'apprivoiser.
Juste la fin du Monde est actuellement disponible sur Netflix.