Martin Scorsese livre dans une tribune une réflexion sur l'ère du streaming et son impact néfaste sur le monde du cinéma. Une sortie qui devrait une nouvelle fois faire parler.
Pas son premier coup de sang
En matière de cinéma, Martin Scorsese n'est pas le premier bleu venu. En effet, on rappelle qu'avec Steven Spielberg, George Lucas, Brian De Palma et Francis Ford Coppola, il fait partie des grandes figures du Nouvel Hollywood. Dès lors, quand il parle de 7ème Art, il n'a pas la langue dans sa poche. Surtout lorsqu'il estime que son évolution part en cacahuète.
C'est sans doute pour cela que sa critique sur les films de super-héros avait fait grand bruit. C'était en 2019, le réalisateur avait alors déclaré que ces longs-métrages étaient comparables à des parcs d'attraction mais n'étaient en aucun cas du cinéma. Une sortie qui avait fait du bruit, et lui avait attiré soutiens comme détracteurs. Quelques mois plus tard, il en avait d'ailleurs remis une couche en estimant que les salles de cinéma devenaient des foires en présentant ce genre d'œuvres. Et qu'ils abaissaient le niveau artistique et réflexif du "vrai" cinéma. En clair, le cinéma de divertissement, ce n'est pas pour le papa des Affranchis et de Casino.
Une nouvelle saillie sur le streaming
L'année dernière, Martin Scorsese s'était déjà exprimé sur les plateformes de streaming. En effet, ce dernier s'inquiétait déjà que dans une époque où la crise sanitaire faisait fermer les salles de cinéma, les studios reportaient de plus en plus leurs productions sur Netflix, Amazon, HBO Max ou bien encore Disney+. Il dénonçait alors le fait que le cinéma soit relégué au second plan, et dévalorisé. Une déclaration que ses détracteurs pourront juger paradoxale quand on sait que Scorsese lui-même s'est servi de Netflix pour diffuser son dernier long-métrage : The Irishman.
Dans une tribune signée dans le Harper's Magazine, le cinéaste italo-américain s'insurge donc contre les dérives de l'industrie du streaming. Ainsi, après avoir rendu hommage à l'un de ses idoles, Federico Fellini, il dit tout le mal qu'il pense sur le business de l'industrie filmique actuelle :
Le cinéma est systématiquement dévalué, mis à l’écart, rabaissé et réduit à son plus petit dénominateur commun : le contenu. (...) Il y a 15 ans, ce terme n’était entendu que lorsque les gens parlaient sérieusement de cinéma, et il était différencié de la "forme". Peu à peu, il a été de plus en plus utilisé par des personnes qui ont pris le contrôle des compagnies médiatiques, et dont la plupart ne connaissent rien de l'histoire de cette forme d'art, ou même ne se soucient pas vraiment de ce qu'elle devraient en faire.
En roue libre, le réalisateur se laisse même aller à une petite provocation qui rappelle ses dénonciations passées :
Le terme "contenu" est devenu un argument commercial pour désigner toute image en mouvement : un film de David Lean, une vidéo de chat, une publicité pour le Super Bowl, une suite de films de super-héros ou bien un épisode de série.
Le danger des algorithmes
Le réalisateur reconnaît que cette nouvelle approche popularisée par le streaming a profité à de nombreux cinéastes, y compris lui. Toutefois :
Cela a créé une situation dans laquelle tout est présenté au spectateur sur un pied d'égalité. Cela peut sembler démocratique mais ça ne l'est pas. Si ce que vous visionnez est "suggéré" par des algorithmes basés sur ce que vous avez déjà vu, et que ces suggestions sont seulement basées sur le sujet ou le genre, qu'est-ce que cela fait à l'art du cinéma ?
Une sortie qui devrait faire réfléchir... Et faire également parler dans le milieu cinéphile.