Au sein de son impressionnante filmographie, Quentin Tarantino considère que "Boulevard de la mort" figure tout en bas de la liste. Lors de la sortie du slasher avec Kurt Russell, le cinéaste a d'ailleurs vécu une projection peu glorieuse en compagnie d'Edgar Wright.
Boulevard de la mort : les poursuites infernales
En 2007, Quentin Tarantino s'associe avec son ami Robert Rodriguez pour le diptyque Grindhouse. Si aux États-Unis, il s'agit d'un double programme rendant hommage aux films d'exploitation, les deux longs-métrages ont droit à des sorties distinctes en France, dans des versions rallongées.
Celui de Quentin Tarantino, Boulevard de la mort, prend la forme d'un slasher sur les routes américaines scindé en deux parties. Dans la première, le cascadeur Stuntman Mike (Kurt Russell) prend au piège une première victime, Kim (Rose McGowan), dans un bar. En fin de soirée, il propose de la raccompagner avec son bolide, conçu pour être à l'épreuve des chocs à la place du conducteur, mais pas à celle du passager. Après l'avoir malmenée, il prend en chasse un groupe d'amies, composé de Vanessa Ferlito, Sydney Tamiia Poitier et Jordan Ladd.
Dans la deuxième partie de Boulevard de la mort, Stuntman Mike cherche de nouvelles cibles. Mais lorsqu'il se lance à la poursuite de Zoë Bell, Rosario Dawson, Mary Elizabeth Winstead et Tracie Thoms, le fou du volant n'a pas conscience qu'il est tombé sur des adversaires redoutables.
Le "pire" film de Quentin Tarantino ?
Oeuvre ultra référencée, multipliant notamment les hommages à la carrière de Kurt Russell ainsi qu'à des thrillers où des meurtriers sévissent sur les routes comme Duel, Road Games ou Hitcher, Boulevard de la mort n'est pas le long-métrage que Quentin Tarantino préfère de sa filmographie. Lors d'une table ronde avec Ben Affleck, Gus Van Sant, David O. Russell, Ang Lee et Tom Hooper organisée par The Hollywood Reporter en 2012, le cinéaste assure même qu'il s'agit du projet le moins abouti de sa carrière.
Alors qu'il évoque déjà le fait de prendre sa retraite et l'idée de ne pas faire le film de trop, le réalisateur explique :
Je connais très bien la carrière de nombreux réalisateurs, et quand vous regardez leurs cinq derniers films, ils étaient vraiment déconnectés de l'époque, que ce soit William Wyler avec On n'achète pas le silence ou Billy Wilder avec Fedora et Buddy Buddy. Pour moi, tout tourne autour de ma filmographie, et je veux partir avec une filmographie formidable. Boulevard de la mort doit être le pire film que j'ai jamais fait. Et pour un film raté, ce n'est quand même pas si mal que ça, non ? Donc s'il reste le pire film de ma carrière, ça me va.
"Une expérience qui force l'humilité"
Si Quentin Tarantino n'est pas tendre vis-à-vis de Boulevard de la mort, c'est peut-être parce qu'il n'a pas digéré son échec commercial. Tandis que le double programme Grindhouse dépasse à peine les 25 millions de dollars de recettes aux États-Unis, le long-métrage sur Stuntman Mike ne rapporte que 31 millions de dollars dans le monde. Au cours d'une session de questions-réponses organisée avec des fans par Empire en 2020, le cinéaste affirme à propos de ce plantage, cité par Les Inrockuptibles :
Concernant le diptyque Grindhouse, je pense que Robert Rodriguez et moi-même présumions que les gens se sentaient assez proches du concept des doubles programmes et des films d’exploitation. (…) Non, ils ne l’étaient pas. Pas du tout. Ils n’avaient pas une putain d’idée de ce qu’ils étaient en train de regarder. Ce qu’on faisait ne signifiait rien pour eux. Sur ce cas précis, on a été un peu trop sûrs de nous.
Il se remémore ensuite une séance londonienne peu glorieuse en compagnie d'Edgar Wright :
J’étais à Londres pour la promo avant la sortie. Et je vais voir Edgar Wright : "Hey, et si toi, tes potes et moi on allait le voir vendredi soir ?". Donc sa productrice Nira Park, Joe Cornish et toute la bande à Edgar, on va au cœur de Piccadilly Circus pour voir Boulevard de la mort le jour de sa sortie. On entre dans le cinéma et il y a genre 13 personnes. Le jour de la sortie, à 20h30 ! C’est une expérience qui force l’humilité. Mais on s’est assis, on l’a regardé et on s’est amusés. Edgar m’a dit : "C’était impressionnant. Je pense que je me serais barré moi. Le fait que tu aies dit 'Rien à foutre', et que tu sois resté, je trouve ça admirable".