Le film "La Soupe aux choux" était cher au coeur de Louis de Funès. Il avait lui-même proposé l'adaptation du roman du même nom à son producteur Christian Fechner, qui ne refusait rien au célèbre acteur. Mais en raison de la santé fragile et des problèmes cardiaques de Louis de Funès, le tournage de cette comédie devenue mythique a été très difficile.
La Soupe aux choux, une comédie parmi les plus cultes
Tourné en 1981 et sorti la même année, La Soupe aux choux est l'avant-dernier film de Louis de Funès. L'immense acteur français, dont la popularité entre les années 60 et les années 80 a atteint des sommets inédits, tournera encore Le Gendarme et les Gendarmettes en 1982, avant de s'éteindre le 27 janvier 1983. La Soupe aux choux est un film mythique. Adapté du roman du même nom de René Fallet, La Soupe aux choux est une comédie où il est question de "pets", mais est aussi un "conte" philosophique sur la nature et la désertification rurale, sur le conflit des générations et le rapport à la modernité.
Si les critiques sont assassines, le public répond présent avec plus de 3 millions de spectateurs. Depuis, chaque rediffusion télévisée de La Soupe aux choux solidifie un peu plus son statut de film culte.
C'est Louis de Funès qui porte le projet d'adaptation de La Soupe aux choux. Il demande à "son" producteur Christian Fechner de le produire, avec Jean Girault à la réalisation. Entouré de sa famille de cinéma, co-réalisateur du film même s'il n'est pas crédité, c'est selon les règles et le planning de l'acteur que le film est tourné. Mais s'il contrôle le tournage, ce n'est pas pour autant facile pour Louis de Funès. En effet, victime en 1974 d'un grave infarctus, il a alors une santé très fragile et doit absolument se ménager.
Un tournage délocalisé
Initialement prévu dans l'Allier, le tournage de La Soupe aux choux est finalement délocalisé en Seine-et-Marne. La délocalisation avait pour but de se rapprocher au plus près des centres hospitaliers parisiens, au cas où l'acteur aurait souffert de problèmes cardiaques. Les maisons des deux protagonistes, "le Glaude" (Louis de Funès) et "le Bombé" (Jean Carmet), sont ainsi construites dans un champ à Évry-Grégy-sur-Yerre et y sont tournées les scènes de jour. Mais pour les scènes de nuit, les assureurs de Louis de Funès sont intraitables. L'acteur doit dormir la nuit, donc il ne tournera pas une fois le soleil couché. Les maisons sont donc démontées puis reconstruites en studio à Épinay pour tourner les séquences de nuit.
Deux heures de sieste obligatoire
Autre contrainte imposée par la santé fragile de Louis de Funès, l'obligation d'effectuer une sieste de deux heures chaque jour. Une précaution qui a retardé le plan de travail puisque l'acteur, qui contrôlait tout et en avait le droit contractuellement, repassait sur le travail effectué pendant sa sieste. Bernard Seitz, assistant-réalisateur sur La Soupe aux choux, racontait ainsi :
Quand il revenait de sa sieste, on lui montrait ce qu'on avait fait pendant qu'il dormait. La plupart du temps, ça lui plaisait. De temps en temps, il y avait un truc qui ne lui plaisait pas et on le refaisait - même si ce n'était pas un plan avec lui. Sur "La Soupe aux choux", on avait fait un plan de Jean Carmet qui ne lui plaisait pas du tout. On l'a refait.
Une star en déclin
Même si ça ne transparaît pas à l'image, la fatigue se fait ressentir en coulisses, et Louis de Funès n'est plus vraiment l'acteur qu'il était. C'est ce que raconte Christine Dejoux, qui incarne la femme du "Glaude", "ressuscitée" à l'âge de 20 ans par l'extraterrestre incarné par Jacques Villeret.
Louis avait envie d'un autre jeu, de travailler dans un autre registre. Sauf qu'en face de lui il y avait Jean Carmet et Jacques Villeret. Quand Fechner a vu les rushes, Louis était un peu en dessous. Il a donc un peu monté son niveau. Il n'a pas fait ce qu'il avait rêvé de faire dans ce film. C'est dommage. (...) Ce qui est à l'image n'a rien à avoir avec ce que j'ai vu. Je l'ai vu quand il me donnait la réplique. Et après j'ai vu le film. J'ai vu les prises qui ont été gardées. Lorsque la caméra était sur moi, ce qu'il faisait été formidable, sensible, et le metteur en scène lui demandait de faire son numéro habituel.
Après ce film, l'acteur semble avoir repris du poil de la bête au moment d'entamer le tournage du film Le Gendarme et les gendarmettes. Mais le décès de Jean Girault pendant le tournage de cet ultime opus de la saga "Le Gendarme" est un coup dur pour Louis de Funès. Le film sort en octobre 1982 et, trois mois plus tard, en janvier 1983, un nouvel infarctus emporte l'acteur.