Disponible en vidéo à la demain sur e-cinema depuis le 30 mars dernier, le semi-thriller futuriste « Titan » n’est passé par la case traditionnelle de la sortie dans les salles obscures. Ceux privilégiant les supports physiques seront donc ravis d’apprendre que TF1 Studio éditera un DVD et un Blu-ray dès le 15 mai 2018.
Après s’être exclusivement investi dans des courts-métrages, le réalisateur Lennart Ruff marque ici ses débuts dans les œuvres destinées au cinéma. Ou, dans ce cas, à la VOD. L’Allemand de 32 printemps a d’ores et déjà remporté un prix avec Nocebo, à l’occasion des Student Academy Awards aux États-Unis en 2014. Ces 38 minutes ont suffi à satisfaire les critiques. Mais en est-il de même pour Titan ?
Afin d’écrire celui-ci, Ruff s’est entouré des plus expérimentés Arash Amel, nominé aux Primetime Emmy Awards pour Grace de Monaco (2014), et Max Hurwitz, qui a illustré ses talents dans des séries télévisées comme Hell on Wheels : L'Enfer de l'Ouest et l’encore inédit ZeroZeroZero. Du côté du casting, le protagoniste est interprété par le héros de la franchise Avatar de James Cameron : Sam Worthington. Taylor Schilling prête quant à elle ses traits à sa femme fictive. L’actrice est particulièrement réputée pour jouer Piper Chapman dans Orange Is the New Black.
Titan : entre avancée et immoralité scientifique
Il faut se rendre à l’évidence : l’œuvre, qui a fait ses débuts dans la catégorie « hors compétition » au Festival international du film de Gérardmer le 3 février 2018, ne séduira qu’une infime partie des spectateurs. Effectivement, les critiques sont majoritairement assassines, et ce, à plus ou moins juste titre. En voici les raisons.
2048. Les ressources manquent, et la vie sur Terre est en proie à devenir impossible. Dans le but de contrarier la disparition de l’Homme, l’OTAN décidé de financer un programme scientifique destiné à améliorer les conditions physiques et biologiques de l’être humain. Sous des airs empruntés au culte Bienvenue à Gattaca (1997), des cobayes élus pour leur résistance voient leurs gènes manipulés. Ils se voient confier une mission : celle de coloniser Titan, le plus grand satellite de Saturne, inhabitable pour l’Homo sapiens standard. Bien sûr, ils ne pourront l’accomplir que si leur corps parvient à résister aux lourdes transformations qui les amènent petit à petit à se métamorphoser en hybride. Ces stades de transition sont visuellement représentés par des lambeaux de peaux tombant au sol, des branchies se développant et leurs cheveux chutant de leur crâne. La tension grimpe en flèche tandis que ces mutations s’opèrent sous les yeux du public. Au final, que restera-t-il d’eux-mêmes ? Posséderont-ils toujours un fragment d’humanité ? Cette question ne cessera de tarauder l’audience durant la première moitié du long-métrage.
Parmi cette équipe dont l’ADN est modifié, se trouve le personnage principal nommé Rick Janssen (Worthington). Cet ancien pilote de l’air est marié à la pédiatre Abi, et dont l’union avec cette dernière a donné naissance à un fils : Lucas (Noah Jupe). C’est à travers cette famille que les défaillances « secondaires » de ces expériences sont principalement rendues explicites. Si être à deux doigts de la cécité est particulièrement menaçant, c’est la mort tragique d’une des sélectionnés et les crises de folie d’un autre qui représentent au mieux l’équivalent d’une sélection naturelle au cours d’une évolution forcée.
Ces dramatiques accidents soulèvent plusieurs questions essentielles à l’heure où la science ne cesse de faire des progrès titanesques. Jusqu’où serions-nous prêts à aller dans la manipulation du génome ? Où se situe la frontière entre l’humain et la créature perfectionnée ? Quelle est la place de la moralité et de l’éthique dans cette affaire ? L’antagoniste de l’œuvre représente ici un extrême qui se révélera intolérable pour beaucoup. Est-ce que ces tests doivent primer sur l’amour et la famille ? Le réalisateur et son équipe semblent penser que ce n’est pas le cas, mais difficile d’en dire plus sans prendre le risque d’en dévoiler un peu trop. Le transhumanisme est un sujet qui n’a pas fini de faire parler de lui dans les prochaines décennies.
Bien que les fondations soient intéressantes et même solides (Titan existant bel et bien et partageant de multiples similitudes avec la Terre), Titan laisse d’indénombrables interrogations en suspens, et n’exploite pas suffisamment sa large distribution. Conséquence d’un budget restreint d’une durée relativement courte de 97 minutes ? Peut-être. Difficile de prendre le temps de se laisser aller au jeu d’une étude psychologique convenable en moins de deux heures. Cela étant dit, il est aussi incroyable de laisser miroiter le spectateur aussi longtemps sans prendre la peine de communiquer davantage sur les fonctions des cobayes en cas de réussite. Doivent-ils y récupérer des échantillons ? Passer les lieux à la loupe ? Ce n’est pas à une dizaine - au départ… - qu’ils risquent de peupler l’endroit ! Pourquoi l’OTAN se donne autant de mal à mener à bien cette affaire, on ne le saura jamais puisqu’une pièce essentielle du puzzle n’est jamais transmise.
Aussi, ce n’est pas le climat présenté par le film qui risque de justifier ces prises de risques. Effectivement, les protagonistes vivent dans des foyers chaleureux, High-Tech, avec piscine, terrasse et tout l’équipement nécessaire à une existence confortable. Où est la famine ? La guerre ? les catastrophes naturelles ? Bref, tout ce qui donnerait envie de se tirer de la planète et d’aider le reste de la population à se trouver un nouvel habitat. Ils ne semblent même pas regarder les informations pour se tenir à la page des dernières actualités. Comment peuvent-ils avoir conscience du chaos qui est censé régner autour du globe ?
En outre, Rick perd le contrôle mais n’est jamais puni. Il est relâché sans la moindre conséquence. Du moins, c’est ce qu’il semble puisque la confrontation finale se termine brusquement, sans révéler ce qu’il advient aux autres personnages que le trio familial. Qu’advient-il du fêlé Professeur Martin Collingwood (Tom Wilkinson) une fois que les militaires se sont retournés contre son commandement ?
Il s’agit d’une poignée de questions parmi des dizaines, mêlant non-dits et incohérences, tels que l’incapacité des mutants à communiquer. Ont-ils donné leur langue au chat ? Ne peuvent-ils plus s’exprimer en anglais ? Si oui, pourquoi ne pas se servir de leurs quatre doigts (oui, deux ont fusionnés !) afin d’écrire un mot ? Les scientifiques font bien part d’émissions hautes-fréquences, mais comment sont-ils au courant d’ailleurs ? Bien sûr, ce mutisme n’aide en rien à explorer les sentiments de ces métamorphosés qui sont dès lors aussi inaccessibles que dénués d’intérêt.
Le comble est, qu’après être passé outre ces « oublis », l’audience n’assiste pas à l’expédition sur Titan, et ne saura jamais rien de la survie du « super-humain » sur le satellite. À par voleter ici et là, que doit-il y faire ? Hum.
Les éditions commercialisées
TF1 Studio est en charge de la distribution du DVD et du Blu-ray, qui paraîtront tous deux en France le 15 mai 2018. À noter qu’à défaut d’une édition collector ou exclusive au marchand FNAC, un fourreau cartonné sera potentiellement fourni avec la galette bleue. La sortie sur ces supports physiques est très limitée au niveau international, puisque s’ajoutent seulement le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Suède et la Finlande.
Test Vidéo/Audio
Probablement tourné en numérique (d’où l’aspect granuleux très faible) au format 2K, Titan démontre une qualité d’image flatteuse et fine. Les détails des textures et de la peau ressortent sans gêne, et les objets sont suffisamment ciselés pour être identifiables. Cette apparence ciselée est magnifiée par différentes teintes de bleus instaurant un certain cachet visuel qui, pour la énième fois, rappelle les partis-pris par Gattaca il y a de cela vingt ans. Si la compression est convenable, elle est imparfaite dû à la présence désagréable du phénomène de banding lors de la scène où le couple se retrouve dans la nature après le massacre survenu dans leur habitation. Commun au streaming, il n’est pas inconnu au marché du support physique. Il résulte en un « effet de bandes » dans les dégradés de couleurs. Autrement dit, à la place d’être « lisse », le dégradé se présente sous forme d’anneaux disgracieux de différentes luminosités.
Quant aux pistes sonores, elles sont au nombre de deux. La version originale, ainsi que le doublage français, sont encodés en au format DTS-HD 5.1. Le visionnage en anglais ne peut cependant pas se faire sans sous-titres. Dommage pour ceux qui préfèrent s’en passer. Les prestations sonores sont irréprochables (tout du moins en VO), disposant d’une spatialisation assez large bien que peu démonstrative. Il faut dire que la bande son signée par le compositeur Fil Eisler (To The Bone) est très discrète. Aucun moment en particulier ne restera gravé dans la mémoire des cinéphiles, mais l’audio fait bien son travail avec ce qui lui est donné.
Test Bonus
Les direct-to-video sont rarement mieux traités que les films indépendants en matière de suppléments. Titan n’échappe pas à la règle puisque le disque propose une seule featurette. Par conséquent, ne comptez pas sur des scènes coupées ou à un commentaire audio.
- Making of (9:56 min) : ce titre paraît mal adapté en vue de sa nature. Aucune image prise sur le tournage n’est dévoilée. Il s’agit uniquement d’extraits d’interviews avec le casting et le reste de l’équipe, couplés à des scènes de Titan. Les acteurs reviennent sur ce qui leur a plu dans le script, et s’arrêtent sur l’évolution des personnages. Ensuite, entre autres sujets, le maquillage et les différentes prothèses utilisées sont abordés.