Malgré un casting populaire, « Marshall : La vérité sur l’affaire Spell » s’est fait discret depuis sa sortie en salle aux États-Unis où il a aussi bénéficié d’une sortie Blu-ray. Quant aux Français, ils devront se contenter d’une sortie VOD et achat digital dès le 13 juin 2018.
Après avoir dirigé Eddie Murphy (Shrek) dans son Boomerang de 1992, Reginald Hudlin a produit le fameux Django Unchained (2012) qui lui a valu son unique nomination aux Oscars. Depuis cette collaboration avec Quentin Tarantino, le réalisateur s’est principalement illustré à la télévision grâce à des séries telles que Les Boondocks et Black Panther. Avec Marshall : La vérité sur l’affaire Spell, fruit du travail de l’avocat Michael Koskoff et de son fils Jacob, scénariste à l’origine de l’adaptation de Macbeth datant de 2015, il signe un nouveau long-métrage.
Marshall : un combat pour l’égalité
L’œuvre cinématographique est un biopic se concentrant sur l’un des nombreux dossiers traités par Thurgood Marshall (Chadwick Boseman) aux États-Unis durant le siècle dernier. Si la Constitution du pays prône l’égalité des droits et l’égalité de tous, l’esclavage et la ségrégation ont longtemps été des caractéristiques intrinsèques à la société américaine. C’est dans un contexte où le racisme est toujours omniprésent que l’avocat en droit civil, d’une trentaine d’années, devient le premier Afro-Américain à obtenir un siège à la Cour Suprême à partir de 1967. Pourtant, ce n’est pas à ce tournant historique de l’histoire américaine qu’est confronté le spectateur.
Le public se trouve plongé en 1941, lors d’une affaire opposant Eleanor Strubing (Kate Hudson), une femme blanche mariée et aisée, à son chauffeur et majordome noir nommé Joseph Spell (Sterling K. Brown). Soupçonné de l’avoir violé et de l’avoir ensuite jeté du haut d’un pont, l’homme est menacé de passer le restant de ses jours enfermé en prison si la sentence en décide ainsi. S’il se déclare innocent, c’est sans compter sur les préjugés des lois Jim Crow qui jouent en sa défaveur. Pour mener sa défense, qui d’autre que Marshall, membre de l’association nationale pour la promotion des gens de couleur (NAACP) ? Malheureusement, le juge (James Cromwell) ne l’entend pas de cette oreille et lui refuse le droit de s’exprimer puisqu’il ne vient pas de l’État où ils se trouvent. Il ne lui reste plus qu’à se trouver un allié, qui se révèle être l’avocat juif Sam Friedman interprété par Josh Gad (La Belle et la Bête). D’abord réticent et craignant pour sa réputation tout autant que pour celle de son cabinet, il se laisse peu à peu prendre au jeu grâce à la personnalité haute en couleur de son partenaire.
Le film opère alors un relatif changement de dynamique en choisissant de ne plus se concentrer uniquement au jugement, mais aussi à la relation entre les deux individus. À la manière d’un véritable buddy movie, tous assistent à des échanges tantôt corsés, tantôt amicaux, voire même on ne peut plus amusés entre ces protagonistes. Ce lien permet de ne pas présenter une œuvre cinématographique trop lourde et violente, parfois ponctuée de scènes difficiles où les horreurs infligées aux Afro-Américains sont citées.
Si Reginald Hudlin justifie à BoxOffice Pro son choix de se concentrer sur ce court chapitre de la vie de l’avocat par le souhait de prendre son temps et « d’inspirer aux personnes l’envie d’en apprendre davantage sur lui » avant de le qualifier de « super-héros », Marshall : La vérité sur l’affaire Spell n’est pas dénué d’erreurs. Lors d’un article pour Showbiz 411, Roger Friedman revient sur les invraisemblances du film, mais surtout sur le portrait faussé de son grand-oncle : Sam Friedman.
Mon grand-oncle a été dépeint dans « Marshall », et dans les documents de presse, comme un novice à la loi de procès, anxieux en l’absence de Thurgood Marshall. Dans le film, Sam est vu comme une personne qui craignait pour sa vie et redoutait que sa réputation soit ruinée s'il perdait l'affaire. C'est risible. En réalité, il pratiquait le droit depuis quatorze ans, avait une solide réputation d'avocat, et n'était certainement pas le novice agité décrit dans les critiques et les documents publicitaires. Je ne doute pas que Sam savait qu'il gagnerait l'affaire une fois le procès commencé. Presque pas un mot de la représentation de mon grand-oncle dans le film est exact. Mon oncle n'a jamais été battu par quiconque, surtout des voyous racistes.
Dommage. Pourquoi avoir choisi de malmener ce personnage historique ? Dans le but de rajouter une pointe de comédie ? De permettre des instants plus dramatiques ? Malgré tout, Marshall permet de mettre la lumière sur une forme de résistance plutôt méconnue, et sur une bataille absente des cahiers d’histoire.
Les éditions commercialisées
Marshall : La vérité sur l’affaire Spell fait partie de la collection OVNI distribuée par Sony Pictures en France, et qui compte notamment All Saints (2017) et Keep Watching (2017). Par conséquent, les intéressés n’auront d’autres choix que de se tourner vers un service de vidéo à la demande ou d’effectuer un achat digital. Seconde solution : importer le Blu-ray américain. Dans ce cas, la maîtrise de la langue de Shakespeare est indispensable puisqu’aucune piste de sous-titres en français n’est proposée. Plus difficile d’accès : la galette bleue canadienne qui, elle, en met à disposition.
Test Vidéo/Audio
Attention, ce test se base sur un Blu-ray non-commercialisé.
Tourné en numérique avec une résolution 6.5K selon IMDb, le disque offre une qualité d’image en tout point remarquable. De très bonne tenue, elle permet de reproduire des détails d’une infinie richesse, qu’il s’agisse de la texture de la peau, des vêtements, mais aussi des paysages et des décors comme le tribunal. Quant aux couleurs, elles sont fidèlement restituées, renvoyant une large palette de jaunes et de marrons. La présence de bruit numérique est très limitée, résultant en une propreté saisissante, et les noirs, bien que profonds, ne sont pas bouchés. Face à une telle prestation technique, il est regrettable que le long-métrage ne soit pas disponible dans les rayons.
La piste sonore, dans sa version originale, est encodée en DTS-HD Master 5.1. Neutre, elle ne fait pas dans la surenchère et se contente de partager des dialogues clairs tout en propulsant le spectateur à une époque où la musique jazz est un phénomène. Les ambiances sont feutrées, notamment lors des auditions, instaurant un aspect plutôt intimiste à l’ensemble.