En 1960, Alfred Hitchcock faisait hurler les salles obscures du monde entier grâce à son horrifique « Psychose » et sa scène de douche devenue culte. Beaucoup ignorent pourtant que de ce classique du cinéma ont dérivé trois suites deux décennies plus tard. Vous pouvez désormais corriger vos lacunes en les découvrant en Blu-ray dès maintenant. Âmes sensibles s’abstenir.
Il était temps ! Le Bates Motel reprend du service huit ans après la première édition française de Psychose en 2010. Et deux acteurs issus de la distribution originale sont de la partie ! De quoi séduire les complétistes, curieux et fans assidus de Norman Bates victime de ses hallucinations meurtrières. Ce second opus a été dirigé par Richard Franklin (Le Diable dans le Sang) en 1983 puis a engrangé près de 34,8 millions de dollars de recettes aux États-Unis.
Psychose II : ils essayaient d’être sa mère
22 ans après avoir été interné dans un hôpital psychiatrique, Norman Bates (Anthony Perkins) est relâché dans la nature en dépit des protestations de Lila Loomis (Vera Miles). Déposé dans le manoir où il a commis des crimes abominables, il lui faut faire preuve d’une détermination à toute épreuve pour ne pas retomber dans ses anciens travers. Il parcourt l’habitation familiale où la présence de sa mère ne semble toujours pas s’être totalement dissipée bien qu’accepter la mort de cette dernière est l’un des critères permettant de juger son état mental. Il passe outre pour se focaliser sur son travail arrangé par son médecin. C’est dans ce restaurant qu’il fait la connaissance d’une jeune fille nommée Mary (Meg Tilly). La vie sentimentale de celle-ci est un désastre comme en prend conscience le protagoniste en surprenant une conversation téléphonique. Son petit-ami vient de mettre un terme à leur colocation. Elle n’a plus de toit sur la tête. Que faire si ce n’est se montrer généreux et l’inviter à prendre une chambre du motel désormais sous-dirigé par un certain Warren Toomey (Dennis Franz) ?
L’homme n’a rien d’admirable. Alcoolique, il se sert des lieux pour organiser un trafic de drogue et encourage la luxure comme en témoigne les gémissements qui finissent par mettre la puce à l’oreille de son patron. Finalement, le fils de Norma décide d’accueillir la demoiselle chez lui après avoir renvoyé son employé. À partir de ce jour, sa vie bascule à nouveau lorsqu’il reçoit des appels et des mots signés de sa mère de plus en plus fréquemment. Des événements mystérieux hantent le manoir. Une silhouette noire se tenant devant la fenêtre de la chambre de la défunte, la sensation d’être épié… Son angoisse de perdre la tête est sans appel mais il parvient à garder le contrôle lorsque Toomey le confronte oralement en public.
C’est sans compter une personne vêtue d’une robe noire qui le poignarde à mort alors qu’il remballe ses affaires plus tard dans la soirée. Dès lors, les assassinats se multiplient. Est-ce vraiment Norman Bates le coupable ?
Psychose II est l’une de ces suites qui laisse un goût mi-figue mi-raisin. Le film compte de nombreux hommages à son grand-frère ainsi qu’à Alfred Hitchcock (Vertigo) dont l’ombre plane (littéralement même au cours d’une scène). Deux membres du casting sont de retour, les décors sont parfaits, etc. Mais le point noir du long-métrage n’est autre que Lila Loomis dont un simple caméo aurait été préférable pour ne pas « désacraliser » le personnage. Au lieu de se contenter de son apparition initiale durant la remise en liberté de Norman, la femme perd tout de saveur en troquant sa classe, sa détermination et son intelligence contre une obsession malsaine, déroutante et franchement terrifiante. À côté, le protagoniste paraît presque plus sain d’esprit alors qu’il est tourmenté par la soif de vengeance de la sœur de Marion Crane. Il n’était pas utile d’en arriver à de tels extrêmes dans l’unique but d’établir une connexion supplémentaire avec le Psychose original.
Pris à part, ce spectacle a énormément de mérite. Bien sûr, il est difficile de ne pas froncer les sourcils en apprenant que Norman est libre de retourner chez lui sans être encadré 24h/24h, 7j/7. Comment peut-on décider de renvoyer un tueur en série là où il a commis ses crimes ? S’il est qualifié de « guéri », les risques de récidives n’en sont pas moins inexistants ! Ne pas retrouver les décors familiers aurait joué contre ce second volet c’est certain, mais cela aurait objectivement été plus crédible. Qui plus est, le faire travailler en cuisine, près de son ustensile favori, n’est pas non plus l’idée la plus lumineuse de ceux en charge de sa réintégration au sein de la société. Dose de rappel : jouer avec le feu est dangereux et le retour de flamme peut mortellement brûler.
L’introduction de Mary entraîne des situations inédites puisqu’elle s’approprie des caractéristiques similaires à Norma (Vera Farmiga) dans la série dérivée Bates Motel. Elle devient le pilier de l’anti-héros dans sa quête de la rédemption ainsi que son alibi. La serveuse prend soin de lui, le protège des forces de l’ordre et lui procure la douceur et l’attention dont il manquait cruellement depuis toujours. L’interprète joue avec une innocence tout aussi attachante que crédible qui justifie l’attachement grandissant que Norman éprouve à son égard. Le personnage principal masculin n’est pas non plus en reste. Perkins exécute avec brio la retranscription de sa lutte intérieure. Va-t-il craquer ? Réussira-t-il à tenir bon ? C’est par ces questions que Psychose II tient l’audience en haleine. La tension servie par un scénario très bien ficelé malgré plusieurs imperfections est à couper au couteau dans ce thriller mêlant suspense, horreur et psychologie.
Les éditions commercialisées
Il aura fallu du temps pour que Psychose II trouve sa place dans les bacs en haute-définition. Son arrivée physique sur le support est à l’initiative d’Universal Pictures France. Il n’existe ni steelbook, ni fourreau, ni exclusivité FNAC et aucune intégrale ne semble programmée pour l’instant. Les passionnés bilingues en quête d’un packaging original et d’un contenu plus étoffé se tourneront naturellement vers le Blu-ray UK avec sa jaquette réversible édité par Arrow, malgré l’absence de sous-titres français.
Test Vidéo/Audio
Dans l’optique de s’adapter à la norme de la haute-définition, un scan des éléments en 35mm a été réalisé pour le disque de Shout Factory destiné au marché outre-Atlantique en 2013. Le résultat est sans appel : Psychose II n’a jamais été aussi resplendissant. Le temps du DVD recadré en 4/3 à la qualité fortement discutable est oublié et les spectateurs pourront se réjouir de cette cure de jouvence plus que nécessaire.
Pour commencer, aucune réduction numérique du bruit vidéo outrancière n’est à pointer du doigt. L’œuvre possède une texture granuleuse loin d’être intrusive, avec des contours naturels qui ne souffrent pas d’un renforcement digital. Autrement dit : elle revêt une apparence filmique appropriée à sa source ! La vidéo n’est pas aussi ciselée que pourrait l’espérer ceux appréciant un visuel ultraléché. Ainsi, le piqué ne fait pas de miracles quand bien même les gros plans ne sont pas en reste quant à la quantité de détails retranscrit. L’image est douce, adoucissant l’impression de profondeur à l’exception de plans quasi-vertigineux comme la plongée au-dessus des escaliers sinueux à l’intérieur du manoir.
Au vu du genre de cette suite, Universal ne pouvait proposer un master au gamma faussé et aux noirs essoufflés. Par conséquent, l’obscurité est omniprésente dans les propriétés des Bates puisqu’une luminosité supérieure n’a pas été préférée. Cela confère un aspect sordide à l’habitation qui semble salie par le grain et des teintes tirant parfois sur le marron et le jaune. Il n’est pas impossible que des noirs bouchés soient présents lors des scènes extrêmement sombres (celles dans la cave en tête) mais Psychose II n’a jamais été une référence visuelle avec sa photographie non-optimale. Les couleurs (adieu le noir et blanc !) sont joliment saturées comme l’attestent le vitrail dans l’entrée ainsi que le sang d’un rouge profond et épais qui envahi la salle de bain. Les tons de la peau varient, parfois trop prononcés et d’autres fois presque anémiques. Encore une fois cela ne suffit pas à rebuter.
Quelques débris se sont glissés ça et là tels que des points blancs mais demeurent rares sans provoquer de gêne. Les minutes les plus abîmées sont celles provenant de Psychose, mobilisées en tant qu’introduction. Plutôt étonnant sachant que le film a été restauré longtemps auparavant. Globalement, ce Blu-ray est une réussite même s’il ne fait pas de merveilles.
Les pistes française et allemande sont au format DTS 2.0 tandis que la version originale se voit offrir un DTS-HD 2.0. Le mix DTS-HD 5.1 supplémentaire fourni dans les autres pays est ici aux abonnés absents. Cela ne dérangera pas les puristes préférant un système sonore fidèle à celui de 1983. Dommage pour ceux souhaitant découvrir cette immersion sonore actualisée. Il n’y a pas grand-chose à dire de cette piste anglaise dépourvue de grésillements puisque seules deux enceintes sont mobilisées, limitant les effets surround et directionnels. À des dialogues intelligibles s’ajoutent des bruits d’ambiance parcourant le paysage sonore restreint mais efficace à l’instar des craquements de la maison et du tonnerre faisant rage à l’extérieur. Les aigus et les notes profondes de la musique de Jerry Goldsmith (Les Banlieusards) s’en sortent aisément bien que le manque de basses empêche d’y insuffler une véritable vitalité.
Test Bonus
La déception est monumentale lors de la tentative d’accès aux suppléments du disque. Pourquoi ? Car il n’y en a aucun. En-dehors du long-métrage la galette est entièrement vide et même… sans menu ! Oui, pour paramétrer votre visionnage il vous faut utiliser la touche « pop-up » de votre télécommande une fois Psychose II lancé en dépit d’un écran de lancement qui vous fait choisir le langage audio sans possibilité d’opter pour des sous-titres. Pratique. Une décision très discutable en 2018.
Pour ne rien arranger, les Blu-ray américains et britanniques regorgent de bonus en tous genres ! Ils proposent notamment un commentaire audio du scénariste Tom Holland (Les Contes de la crypte), des panels de discussion, des featurettes d’époque, un documentaire sur Robert Bloch et des trailers/bandes-annonces. Est-ce que cela s’explique par des problèmes de droits ? Universal Pictures France est loin d’être un studio indépendant. Ne pouvait-il pas concocter quelque chose à se mettre sous la dent ?